« La politique régionale de l’Iran : le politique et le religieux » par Omar Al Assaad

Article  •  Publié sur Souria Houria le 12 octobre 2014

Photo_عمر الأسعد
« La politique régionale de l’Iran : le politique et le religieux »

« Les dimanches de Souria Houria » le 28 septembre 2014, avec l’écrivain et chercheur Bernard Hourcade et l’ex vice-ministre des affaires étrangères iranien Ahmad Salamatian.

par Omar Al Assaad – Traduit pour Souria Houria R.S. ,

 

Sous le titre «  la politique régionale de l’Iran : le politique et le religieux », l’association Souria Houria, et dans le cadre de sa réunion mensuelle dirigée par l’écrivain et éditeur syrien Farouk Mardam Bey , a accueilli le chercheur  Français Bernard Hourcade, chercheur,  géographe et  ancien directeur de l’Institut Français de recherche en Iran de 1978 à 1993, et Ahmed Salamatian ex vice-ministre des affaires étrangères iranien en 1980 et ex député de la ville d’Ispahan, exilé en France depuis 1981 et auteur, avec Sara Daniel, du livre « La révolte  verte » publié en 2010.

Mardam Bey a ouvert le dialogue en présentant les invités et en évoquant le thème principal de la réunion : les politiques régionales de l’Iran, l’exploitation du facteur religieux dans sa politique étrangère et l’impact de ce facteur sur le monde arabe, signalant  le poids de la présence iranienne en tant qu’Etat doté d’un rôle important et un acteur clé dans les décisions politiques de la région.  Sa politique vis-à-vis des pays arabes ressemble à celle d’un Empire comme le prouve ses positions en Syrie, au Liban, en Iraq et au Yémen  et son exploitation des divisions religieuses dans le Machrek arabe.

Le chercheur Bernard Hourcade a évoqué les images de massacres en provenance du Moyen Orient, l’exploitation de l’élément religieux dans le conflit sur fond de division sunnite-chiite, signalant le facteur nationaliste qui oriente la politique étrangère iranienne dans le monde arabe, qui s’ajoute au facteur religieux ce qui a poussé le régime iranien à prendre les positions que l’on connait concernant  l’Irak et la Syrie àtitre d’exemple.

Hourcade a également évoqué le discours iranien, destiné  autant à l’intérieur  qu’àl’extérieur du pays, comme  ayant été le premier pays à expulser l’ambassade israélienne de Téhéran et la remplacer  par l’Organisation de Libération de la Palestine, les appels continuels de ses dirigeants contre Israël au point que l’ex président Ahmadinejad a renié l’holocauste et a appelé à l’élimination d’Israël en la jetant à la mer, à cela s’ajoute le soutien du régime iranien aux organisations et  groupes armés connus pour leur hostilité aux Etats Unis ou à Israël  en choisissant le plus souvent  des groupes religieux chiites. Cet élément religieux est très visible dans la position iranienne concernant les questions importantes du Moyen Orient que ce soit en Syrie, en Iraq, au Liban ou au Yémen et à noter son soutien aux groupes religieux chiites qui lui sont attachés et qui opèrent en dehors du cadre de leurs propres Etats et des  institutions de ce dernier  en menaçant l’entité de ces pays. Hourcade a comparé la politique iranienne qui soutient les groupes religieux qui travaillent pour elle à la politique des rois d’Europe vis-à-vis de l’Orient qui utilisaient le cas des chrétiens comme prétexte de base à leurs interventions dans la région.

Hourcade a également parlé de la peur historique du blocus qu’a connu l’Iran. Dans l’Histoire récente l’Empire Iranien était presque encerclé par les arabes et les ottomans qui formaient un seul Etat à ses frontières à l’ouest, et par l’Empire russe au nord, à cela s’ajoute la présence anglaise qui a commencé à croitre au début du XXème siècle que ce soit à ses frontière  à l’ouest ou à l’est. Tout ceci a poussé l’Iran à essayer d’assurer ce qu’elle considère comme son espace vital qui s’étend d’Afghanistan à l’est jusqu’à la Méditerranée et c’est pour cette raison que l’Iran n’a pas permis un déséquilibre en faveur de ses adversaires en Syrie  de peur que la Syrie se tourne vers l’Arabie Saoudite ou la Turquie  qui la concurrencent ce qui conduirai sûrement à affaiblir Bagdad puis Téhéran.  Se basant sur toutes ces données que connait Téhéran s’ajoute sa volonté d’acquérir l’arme nucléaire et l’énergie atomique en présence de forces nucléaires proches dans la région que ce soit le Pakistan à l’est et Israël à l’ouest.  L’Iran apparait comme si elle défendait ses acquis  dans la région arabe qui sont ses cartes négociatrices ce qui rend ses positions encore plus fermes vis-à-vis de ces sujets afin de priver ses ennemis dans la région, et plus précisément les arabes du Golfe et les turcs, de profiter de leur énorme superficie pour l’encercler et lui mettre la pression politiquement et géographiquement.

De son côté l’ex vice-ministre et ex député Salamatian a parlé de l’interférence du politique et du religieux que ce soit dans la politique iranienne ou dans la région du Moyen Orient en général, comparant ce qui se passe aujourd’hui avec les constats de visites précédentes à des capitales et  pays arabes dans les années soixante et soixante-dix qui lui permettent d’assurer que le conflit actuel n’avait précédemment ni cette apparence ni cette dureté. Il explique cela par un retour au passé et la progression  des appartenances ethniques et religieuses qui s’ajoutent aux éléments politiques et aux conflits nationalistes.

En ce qui concerne l’Iran, Salamatian a assuré qu’un large  mouvement démocratique était contre le Shah du temps du Général Mousdek, que les américains et l’occident en général avaient soutenu le mouvement de Khomeiny dans leur  recherche  d’une personnalité religieuse et d’un mouvement pour faire face à l’expansion communiste, qu’à l’arrivée de Khomeiny la révolution n‘était pas islamique-chiite et que  la dimension religieuse et ses principes n’étaient pas encore implantés.

Salamatian a également parlé du conflit actuel et du rôle iranien que ce soit par le biais de son allié au Liban le Hezbollah qui perturbe la vie politique et les institutions dans ce pays et joue le rôle du bras armé soutenu par l’Iran et qui agit en dehors de ses frontières et même en dehors des frontières libanaises  avec la participation de ses membres au conflit en Syrie et de la forte influence iranienne en Iraq militairement et politiquement.

Salamatian a considéré que le soulèvement en Iran suite aux élections remportées par Ahmadinejad en 2009 n’était pas séparé des événements du Printemps Arabe qui s’est déclenché en Tunisie un an plus tard, et que ce soulèvement  avait été dirigé par la classe éduquée  et les jeunes militants de la classe moyenne, ceux qui étaient  le plus touchés par les répressions des gouvernements de mollahs et leurs pouvoirs en Iran.

En ce qui concerne la Syrie il a parlé du soutien que reçoit le régime de Bachar Al-Assad de la part du régime iranien puisqu’il a reçu un soutien financier qui dépasse 3,5 milliards de $ sans parler du soutien militaire et politique. Le pouvoir iranien étant convaincu de son lien avec le régime syrien et que ce dernier défend les intérêts de l’Iran. Salamatian a également demandé à l’opposition syrienne de rencontrer et de collaborer avec l’opposition iranienne et avec ses  jeunes dirigeants, il a reproché à certains dirigeants de l’opposition syrienne leurs rencontres avec  l’organisation des Mojahedin  Khalgh en considérant que ces rencontres sont une erreur car une partie des iraniens sont allergiques à ce courant politique et à son histoire.

A la fin les deux invites ont répondu aux questions et interventions du public qui se sont focalises sur le rôle iranien dans la région, l’enchevêtrement  du politique et du religieux et l’exploitation de ce phénomène par le régime iranien, l’impact de cela sur la paix dans la région arabe suite à la déclaration d’un député iranien que 4 capitales arabes sont  désormais subordonnées à Téhéran, il entends par cela Beyrouth, Damas, Bagdad et Sanaa suite au contrôle des Huthi,  le conflit entre l’Iran et les pays du Golfe à commencer par l’Arabie Saoudite, les relations entre les israéliens et les iraniens, le dossier du nucléaire iranien, les conséquences des positions politiques iraniennes  sur le Mashreq arabe en l’absence d’un projet pour la région et son  implication dans un cycle de violence ainsi que l’impact des politiques iraniennes a l’intérieur de l’Iran et les changements qu’elle a imposé sur la forme et la réalité de l’identité iranienne compte tenu de la croissance de l’influence religieuse dans un pays composé de races, d’ethnies et d’autorités religieuses différentes.

A signaler que les réunions organisées par Souria Houria et dirigées par l’écrivain et éditeur syrien Farouk Mardam Bey tiendront une prochaine séance le 26 Octobre 2014

سياسة إيران الإقليمية بين السياسة والدين – عمر الأسعد