Les palestiniens en Syrie: de la Nakba à nos jours par Omar Al Assaad

Article  •  Publié sur Souria Houria le 16 janvier 2016

Photo_عمر الأسعد

Les palestiniens en Syrie: de la Nakba à nos jours par Omar Al Assaad – Traduit pour Souria Houria R.S.

Sous le titre de « Palestiniens en Syrie de la Nakba à nos jours » Souria Houria a organisé une nouvelle rencontre dans le cadre de ces réunions mensuelles « les Dimanches de Souria Houria », dirigeaient par l’écrivain et éditeur Farouk Mardam Bey. Cette rencontre a reçu Valentina Napolitano chercheur spécialisée à l’Ecole des Hautes Etudes en Science Sociale et à l’Institut Français du Proche-Orient ainsi que l’activiste Khalil Khalil professeur d’arabe qui a présenté un témoignage vivant des souffrances du Camp de Yarmouk sous le blocus du régime syrien.

Napolitano a passé en revu la composition sociale de la présence palestinienne en Syrie, signalant l’arrivée de vagues successives de réfugiés palestiniens en fonction de la situation en Palestine et dans les pays de refuge. 1948 a vu la première vague de réfugiés palestiniens suite à la Nakba, la deuxième vague en 1967 après la guerre de juin, suivi du déplacement d’un certain nombre de palestiniens de Jordanie en 1970 suite aux événement de Septembre Noir, puis durant la guerre civile libanaise et l’invasion israélienne de Beyrouth en 1982, l’arrivée de nombreux palestiniens après la Guerre du Golfe en 1991, et la dernière vague de réfugiés palestiniens en Syrie en 2003 après l’invasion américaine de l’Iraq.

Napolitano a considéré que sur le plan légale les réfugiés palestiniens en Syrie ont profité de leur statut de réfugié en comparaison avec la situation des autres réfugiés palestiniens dans les pays voisins de la Palestine. Ces avantages étaient réglementés par une loi de 1957 qui a accordé au réfugié palestinien des droits égaux au citoyen syrien en ce qui concerne le droit à l’éducation, à l’enseignement, à la propriété, aux soins médicaux, à une carte d’identité semblable à la carte d’identité syrienne signalant son origine palestinienne pour préserver le droit au retour ainsi que le droit d’obtention de passeport.

Elle a considéré que cette situation avantageuse pour les réfugiés palestiniens a contribué à leur interaction et à leur insertion dans la société syrienne.

Napolitano a divisé l’histoire politique de la présence palestinienne en Syrie en 3 principales étapes.

La première ce sont les années 50-60, durant cette époque la Syrie était la base principale d’action des palestiniens avec la monté en puissance de l’activité politique des dirigeants et de la jeunesse palestinienne dans les pays environnants. L’organisation Fateh s’est formée en Syrie et a commencé ses opérations contre Israel au départ de la région du Golan syrien. A la fin des années 60 du siècle dernier il existait en Syrie de nombreuses organisations palestiniennes dont le Fateh, As-Saïqa, le Front Populaire de Libération de la Palestine, le Front Démocratique de Libération de la Palestine. Ces organisations ont adopté l’action militaire comme programme jusqu’à l’arrivée d’Assad père au pouvoir en 1970 et son interdiction de l’action militaire contre Israel au départ des territoires syriens.

La deuxième est de 1970, date de l’arrivée de Hafez Al Assad au pouvoir jusqu’à 1993, date de la signature des accords d’Oslo. Au début de cette période les dirigeants de l’action palestinienne ont emménagé au Liban et certains en Syrie suite aux événements de Septembre Noir en Jordanie en 1970. Le système de sécurité a augmenté sa surveillance des palestiniens présents en Syrie et sur leurs activités suite surtout à la décision du régime de s’impliquer dans la guerre civile libanaise en 1976. Ceci a provoqué des manifestations dans le Camp de Yarmouk contre la politique du régime syrien considéré comme antipalestinienne. Les relations entre le régime et les palestiniens se sont tendues suite à sa politique et à ses relations avec les dirigeants palestiniens.

La troisième et dernière période de 1993, date de la signature des accords d’Oslo, jusqu’à 2011, date du début de la révolution syrienne. La relation entre l’Organisation de Libération de la Palestine et le régime syrien a changé après la signature des accords d’Oslo avec Israel surtout que le régime de Hafez Al Assad était contre cet accord signé par les deux parties, il s’est donc rapproché des organisations et des forces politiques palestiniennes qui s’étaient opposées à l’accord. La présence et l’activité de l’organisation du Hamas s’est retrouvée accrue en Syrie, elle y a ouvert ses bureaux et on lui a permis d’exercer son activité politique et sociale tout au long des premières années du troisième millénaire. Cette relation a continué de la sorte avec les palestiniens jusqu’au début de la révolution en 2011 que la majorité des palestiniens ont rejoint.

L’activiste Khalil Khalil, qui est arrivé récemment de Syrie, a de son côté signalé différents aspects de l’action palestinienne et la relation entre les réfugiés palestiniens et la société syrienne ainsi que de la souffrance dans le Camp de Yarmouk durant la révolution syrienne.

Khalil a commencé par insister sur l’insertion des palestiniens dans la société syrienne et sur la solidité de la relation entre les deux peuples suite à la longue présence palestinienne en Syrie et à leur interaction avec la société syrienne en partageant ses combats et ses problèmes, signalant que les droits des palestiniens en Syrie ont été accordé par le peuple syrien et non par le régime Assad puisqu’ils avaient profité de plus d’aisance et de stabilité avant l’arrivée d’Assad au pouvoir et ont subi les mêmes opérations de répression et de restriction appliqués aux syriens par le régime. Khalil considère donc que la participation des palestiniens à la révolution syrienne était tout à fait normale suite à leur relation et interaction avec un environnement où ils ne se sentent pas étrangers et où ils partagent les mêmes problèmes.

Khalil a divisé la position des factions palestiniennes vis à vis du régime syrien et de la révolution en plusieurs niveaux, certaines ont choisi le silence sans permettre à leurs cadres de s’impliquer dans la révolution et se sont contenté d’un rôle humanitaire et social, d’autres se sont impliqués complètement dans la révolution, ce fut le cas du mouvement Hamas dont les cadres ont joué un rôle important dans l’action politique et humanitaire puis dans l’action militaire en transférant leurs expériences aux groupes actifs dans l’Armée Libre.

Le troisième choix a été celui du mouvement Fateh qui a fait au début des déclarations enflammés contre le régime mais qui, d’après Khalil, a commencé à reculer sur ses position suite à des pressions internationales pour renoncer à ses déclarations.

khalil a considéré que sur le terrain la situation dans le Camp de Yarmouk a évolué au rythme des événements en Syrie depuis 2011. Le Camp avait été au début mis à l’écart des événements politiques afin d’éviter l’utilisation de la carte palestinienne par le régime, il avait reçu des milliers de déplacés syriens des régions sinistrées par les opérations de descente, de bombardement et de destruction. Son rôle s’était restreint à donner le soutien humanitaire et logistique aux régions sinistrées et encerclées, mais ce rôle a énervé le régime syrien qui a commencé à préparer l’opération de blocus du Camp en collaboration avec certaines factions palestiniennes qui lui sont alliées et en premier l’organisation de la direction générale.

Durant cette période les activistes du Camp avaient comme orientation de ne pas s’impliquer dans l’action militaire mais le régime et les factions qui le soutiennent ont commencé par provoquer l’Armée Libre présente dans les régions proches du Camp en kidnappant des personnes. Le régime a lancé les opérations de bombardement par l’aviation militaire avant l’entrée de l’Armée Libre au Camp.

Le régime qui avait autorisé pendant cette période l’entrée et la sortie du Camp des personnes, la sortie des affaires, des biens personnels et familiaux, des vivres avait instauré des règles strictes sur l’entrée dans le Camp des provisions alimentaires, et a facilité aux commerçants la sortie de leur marchandises. Quant il s’est assuré de l’épuisement des vivres dans le Camps, il a instauré le blocus en Août 2013. Les membres du régime ont affiché à l’entrée du Camp le slogan « la famine ou l’agenouillement » dans un but d’humiliation et de provocation, ils ont également accroché un paquet de pain que les encerclés pouvaient voir. Environ 172 personnes sont décédées de famine, la majorité étant des enfants et des personnes âgées.

D’un autre côté Khalil a présenté un témoignage de la résistance des gens au blocus et à la famine par des activités civiles, d’assistance et des institutions d’enseignement de substitution dans laquelle lui même était actif puisqu’il a contribué, à l’intérieur du Camp, avec un groupe de cadres et de volontaires à fonder une école damascène de substitution pour que les élèves ne soient pas privés d’études durant le blocus. Le nombre d’étudiants qui ont suivi cet enseignement, des classes primaires au bac, a atteint 7500 étudiants et étudiantes qui ont pu passer les examens finaux et obliger l’UNRWA et le régime à reconnaitre leurs diplômes.

A noter que cette rencontre a eu lieu le jour de la Journée de Solidarité avec le peuple palestinien le 29 novembre.

عمر الأسعد – الفلسطينيون في سوريا من النكبة وحتى اليوم