Nous voulons rentrer en Syrie…Les réfugiés syriens en France sur le chemin des souffrances – par Hanadi Zahlout

Article  •  Publié sur Souria Houria le 15 août 2013

Abou Ali n’était pas le premier dans la queue devant la porte de la préfecture de Nanterre, dans la banlieue ouest de Paris. À 8h30 du matin, dix personnes seulement, parmi ceux qui font la queue en somnolant, auront la chance d’entrer dans la préfecture pour présenter leur dossier de demande d’asile. Les autres auront à revenir le lendemain, voire la semaine suivante, pour pouvoir déposer leur dossier de demandeur d’asile.

Les Syriens qui ont risqué leur vie pour arriver jusqu’ici dont une femme enceinte qui a fui avec son mari et échappé à une tempête violente avant d’atteindre la côte européenne, sont heureux d’arriver après un voyage épuisant. Mais ils ne s’attendaient pas à devoir affronter cette terrible attente.
L’année passée, quelques centaines de syriens arrivèrent en France, alors que le nombre des déplacés à l’intérieur de Syrie et ceux qui trouvèrent refuge hors de Syrie dépassa le seuil de 5 millions, dispersés entre la Turquie, le Liban, la Jordanie et l’Égypte, ainsi que dans d’autres pays de par le monde.
La France, déjà habituée aux réfugiés arabes qui fuient les régimes sévissant dans leurs pays, accueille aujourd’hui des réfugiés syriens, individuellement ou en famille. Les facilités accordées aux syriens, pour l’obtention d’un visa touristique ou d’un visa de réfugié, sont considérées comme étant sans précédent. Elles sont accordées sur la base d’une décision politique française de soutenir la révolution syrienne. Pourtant, des tracasseries persistent du fait d’un fonctionnaire aux penchants racistes ici ou d’une difficulté bureaucratique là-bas.
Alors que les réfugiés de la révolution syrienne appartiennent à toutes les couches de la société (paysans, ouvriers, étudiants d’université, journalistes,…), ceux d’avant la révolution sont en majorité des réfugiés politiques, des médecins, des ingénieurs, des scientifiques, et des membres de l’élite intellectuelle, qui ont quitté le pays dans les années 80 en quête de liberté. Ils y ont fait des études en espérant pouvoir, un jour, participer à l’édification, de l’intérieur, de la future Syrie. Pour eux, la révolution syrienne fut une renaissance qui a ravivé leurs rêves. Elle les a aussi sensibilisés à la souffrance de leurs familles restées à l’intérieur du pays, et celle de ceux qui ont fui le pays en laissant ce qu’ils avaient bâti en état de démolition ou sous la menace de démolition.
Souvent, les nouveaux réfugiés arrivent en France sans connaître personne auprès de la communauté syrienne en France. Le principal problème rencontré par ces réfugiés, particulièrement à Paris, est la difficulté à trouver un logement, même une petite chambre ou un sous-sol exigu: La présentation et l’instruction de la demande d’asile prennent plusieurs mois, de sorte que les nouveaux arrivants sont parfois obligés de dormir à l’aéroport ou dans les stations de métro, à moins de contacter les services qui s’occupent des sans-domicile-fixe (SDF) en utilisant une cabine téléphonique publique. Il s’agit là d’une réalité amère dont souffrent tous les immigrés qui arrivent dans ce pays.
L’association Revivre, créée il y a une dizaine d’années par des médecins syriens et français, s’était employée, avant la révolution, à soutenir les détenus politiques et d’opinion. Après le déclenchement de la révolution, cette association s’est efforcée d’aider les déplacés à l’intérieur de la Syrie et les réfugiés hors de Syrie tout en continuant de secourir les détenus politiques et leurs familles.
En coopération avec la mairie du 20e arrondissement de Paris, Revivre a pu créer une antenne d’assistance aux réfugiés syriens au sein de la mairie. Du personnel a été affecté à l’assistance des syriens pour les démarches compliquées qu’ils ont à effectuer dans un pays dont la langue est incompréhensible pour la plupart d’entre eux.
De même, des organisations professionnelles, comme Reporters Sans Frontières, ne ménagent pas leurs efforts pour soutenir les journalistes syriens qui sont venus en France afin d’échapper à un sort redoutable. Ainsi; la priorité en matière de logement à la Maison des journalistes, gérée par Reporters Sans Frontières, est accordée aux journalistes syriens.
De leur côté, les organisations juridiques publient des rapports périodiques sur les conditions de vie des réfugiés dans les camps établis en Turquie, au Liban, en Jordanie, en Égypte, et dans d’autres contrées du globe. Mais ces rapports ne couvrent pas ceux qui arrivent avec difficulté dqns le vieux continent. Leur dure errance ici n’est pourtant pas moins amère qu’ailleurs.
Les organisations de secours françaises, ainsi que les groupes de secours syriens fondés par des Syriens de France, s’efforcent de collecter des fonds destinés à l’assistance, alors que la plupart des membres de la communauté syrienne envoient de l’argent directement à leurs familles. Durant ces deux dernières années, il a été fréquent de voir des citoyens Syriens et Français ouvrir leur logement pour accueillir de nouveaux réfugiés, tout en leur fournissant une assistance en nature (vêtements, nourriture, etc.). Ceci étant, il est devenu urgent de trouver de nouveaux mécanismes pour fournir de l’aide aux Syriens les plus démunis, à l’intérieur comme à l’extérieur de la Syrie.
Souvent, nous nous trouvons incapables d’aider lorsque nous apprenons que des Syriens viennent d’arriver à l’aéroport. La Croix-Rouge française leur offre des repas, mais ils sont obligés d’y dormir à même le sol, par temps froid comme par temps chaud. L’on rapporte des cas où d’autres familles sont obligées de squatter des stations de métro, à côté de SDF ivres et de vagabonds, les enfants criant à leurs parents :
« Pourquoi vous nous avez amenés ici ? Nous voulons rentrer en Syrie ».

source : http://blogs.mediapart.fr/edition/paroles-syriennes/article/150813/nous-voulons-rentrer-en-syrie-les-refugies-syriens-en-france-sur-le-chemin-des-s-0

date : 15/08/2013

Activiste et journaliste syrienne, emprisonnée a l’été 2011 dans les geôles du régime de Bachar Al Assad, Hanadi Zahlout a publié le 17 juillet 2013 un article pour le journal syrien all4syria.info qiu évoque la situation des réfugiés syriens fuyant leur pays et arrivant en France, dont nous vous présentons la traduction.