Transition politique en Syrie: l’opposition s’inquiète d’une «ambiguïté américaine»

Article  •  Publié sur Souria Houria le 4 avril 2016
Bassma Kodmani, membre de la délégation du Haut comité des négociations représentant l'opposition syrienne, lors d'une conférence de presse au siège de l'ONU à Genève, le 18 mars 2016

Bassma Kodmani, membre de la délégation du Haut comité des négociations représentant l’opposition syrienne, lors d’une conférence de presse au siège de l’ONU à Genève, le 18 mars 2016
Photo PHILIPPE DESMAZES. AFP

Une responsable de l’opposition syrienne s’est inquiétée dimanche d’une «ambiguïté américaine» sur le sort de Bachar al-Assad, souhaitant avoir confirmation que les Etats-Unis excluent toute «réhabilitation» du président syrien.

«Nous avons une ambiguïté américaine qui nous est extrêmement préjudiciable», a déclaré Bassma Kodmani, membre de la délégation du Haut comité des négociations (HCN) qui négocie à Genève le processus de transition politique en Syrie.

«Nous ne savons pas ce que les Etats-Unis sont en train de discuter avec Moscou, il y a toutes sortes de rumeurs. Nous attendons d’avoir confirmation que les USA sont bien encore sur une position de refus de réhabiliter Assad», a-t-elle ajouté lors d’une émission réunissant plusieurs médias français (RFI/TV5Monde/LeMonde).

«L’administration américaine dans son ensemble continue à dire qu’il ne pourra pas gouverner ce pays», a-t-elle cependant admis, mais «il reste à montrer que les Etats-Unis peuvent se faire entendre par Moscou».

Si les Russes «continuent à penser qu’Assad doit continuer à gouverner, nous n’aurons pas de solution en Syrie», a-t-elle mis en garde.

«La position de l’opposition est très claire: la négociation se passera pendant qu’Assad est encore au pouvoir, mais la transition ne peut pas se produire avec lui», a-t-elle souligné.

Les négociations de paix de Genève, qui doivent reprendre vers le 10 avril, visent à mettre fin au conflit qui a fait plus de 270.000 morts depuis 2011. Elles visent à la mise en place d’une autorité de transition dans six mois, qui sera chargée d’élaborer une nouvelle constitution et d’organiser une élection présidentielle dans 18 mois.

«Une fois que nous aurons mis tout cela sur papier, Assad ne peut pas être celui qui préside à cette transformation du pays, il ne peut pas rester au pouvoir», a martelé Mme Kodmani.

Interrogée sur l’état des négociations intersyriennes (dont deux sessions se sont déroulées en Suisse en février et en mars), elle a estimé que le régime refusait encore de discuter de transition. «Nous sommes bloqués pour l’instant», a-t-elle dit.

Mais Mme Kodmani s’est dite certaine qu’à partir du moment où une autorité de transition ayant les pleins pouvoirs serait mise en place, des militaires du régime et de l’Armée libre (opposition armée) pourraient travailler «ensemble immédiatement pour définir un plan de stabilisation du pays».

«Le départ d’Assad doit être un départ négocié, la fin de ce régime doit être une opération de transition contrôlée et non chaotique», a encore déclaré Mme Kodmani.

Elle a également indiqué que l’opposition avait adressé «une lettre de plainte» à la chef de la diplomatie européenne Federica Mogherini, qui avait rencontré le chef de la délégation du régime Bachar al-Jaafari à Genève lors de la dernière session de négociations.

«Nous avons alerté contre le risque que le régime considère le processus de Genève comme un moyen de se faire réhabiliter internationalement et de se refaire une respectabilité, nous avons exprimé très clairement notre mécontentement», a-t-elle précisé.

Elle a par ailleurs dénoncé «les violations très graves du cessez-le-feu de la part du régime», après des bombardements le 31 mars dans la banlieue de Damas qui ont fait au moins 33 morts, dont 12 enfants.