Yusra, réfugiée syrienne, d’un canot de sauvetage au large de la Turquie aux JO de Rio

Article  •  Publié sur Souria Houria le 10 juillet 2016
Yusra, réfugiée syrienne, d'un canot de sauvetage au large de la Turquie aux JO de Rio

Yusra, nageuse syrienne de 18 ans. (ODD ANDERSEN / AFP)

La nageuse de 18 ans a sauvé des compatriotes avec sa sœur en remorquant leur embarcation lors de la traversée de la Méditerranée. Aujourd’hui, elle rêve d’or au sein de l’équipe de réfugiés du CIO.

L’histoire de Yusra Mardini sort de l’ordinaire. A 18 ans, cette nageuse syrienne fait partie de l’équipe de réfugiés qui participera aux Jeux Olympiques de Rio dans moins d’un mois.

Dix athlètes titulaires du statut de réfugié reconnu par les Nations unies ont été sélectionnés par le Comité international olympique (CIO) pour concourir aux JO au sein de cette équipe. Comme ses coéquipiers, Yusra revient de loin.

La sportive a quitté Damas à la mi-août 2015 avec sa sœur aînée, Sarah, 20 ans. Sa famille avait déménagé de nombreuses fois pour fuir les combats et permettre à ces deux jeunes athlètes de haut niveau de poursuivre leur entraînement. Mais Yusra et Sarah ont finalement dû laisser derrière elles leurs parents et leurs petites sœurs :

« Notre maison avait été détruite, je ne pouvais plus m’entraîner depuis deux ans. »

Sur la côte turque, les deux sœurs embarquent sur un canot pneumatique en direction de l’île grecque de Lesbos. Avec elles sur ce canot conçu pour sept, 18 autres passagers : « Trois seulement savent nager », raconte Yusra.

Trois heures dans l’eau pour pousser le canot

Quand l’embarcation de fortune menace de couler corps et biens, Yusra et Sarah, également nageuse, plongent et remorquent le canot.

« Au début, c’était horrible, mais on a pensé avec ma sœur qu’on aurait vraiment honte si on n’aidait pas les gens partis avec nous. »

Yusra raconte également dans une interview sur le site de « Madame Figaro » :

« C’était terrible de penser qu’en tant que nageuse j’allais finir par mourir dans l’eau, cet élément que je connais si bien. […] Quand j’ai sauté à l’eau, tout le monde priait sur le bateau. Ils me disaient tous ‘Tu es une fille courageuse’ et moi je pensais ‘Taisez-vous, laissez-moi tranquille’. »

A l’aube, après plus de trois heures dans l’eau, les deux sœurs touchent enfin terre et téléphonent à leur père : « Baba [papa en arabe, NDLR], on a réussi! On est en Grèce! » « Ce fut l’attente la plus longue de ma vie », témoigne Ezzat, 45 ans, qui a depuis rejoint ses filles à Berlin.

Puis c’est la route des Balkans, les arnaques des passeurs. Au terminus, Berlin leur offre un lit de camp dans une ancienne caserne de l’armée. L’interprète égyptien de ce foyer met Yusra en contact avec le club de natation de Wasserfreunde Spandau 04 et son futur entraîneur, Sven Spannekrebs.

La qualification pour les JO n’était pas garantie, son entraîneur visait plutôt une participation pour 2020, avant d’oser espérer être à Rio en 2016.

Des réfugiés aux JO : une première

Et en effet Yusra s’est finalement retrouvée parmi 43 athlètes pré-sélectionnés par le CIO pour constituer l’équipe de réfugiés. Début juin, la bonne nouvelle tombe : la jeune Syrienne est l’une des dix athlètes retenus.

Cette équipe, dont la création a été annoncée en janvier par Thomas Bach, président du CIO, en visite dans un camp de migrants en Grèce, n’a pas de précédent dans l’histoire des JO. Outre Yusra, elle se compose de cinq Sud-Soudanais, deux Congolais de RDC, un Ethiopien et un autre Syrien.

Six hommes et quatre femmes au total, qui défileront non pas derrière leur drapeau national respectif, mais derrière le drapeau aux cinq anneaux.

« Tous les athlètes veulent participer aux Jeux Olympiques. Peu importe si c’est un drapeau syrien ou olympique », déclare à ce propos Yusra à l’agence Associated Press.