Aider, écouter, conforter l’opposition syrienne – Editorial du « Monde »

Article  •  Publié sur Souria Houria le 4 octobre 2011

L’opposition syrienne s’organise. C’est un tout premier pas, mais il est encourageant.

En parvenant, samedi 1er et dimanche 2 octobre à Istanbul, en Turquie, à sedonner une direction structurée, le Conseil national syrien (CNS), la contestation au régime de Bachar Al-Assad vient de combler un vide qui ne pouvait qu’être mis à profit par celui-ci en arguant d’une rhétorique coutumière : « Moi ou le chaos. »

Le CNS regroupe une large palette de sensibilités allant des Frères musulmans aux libéraux, des acteurs de l' »intérieur » aux exilés politiques de longue date.

Depuis la mi-mars, le pouvoir syrien a déployé toute la panoplie d’un arsenal répressif impitoyable contre une révolte que rien – ni la mort, ni la torture, ni la prison, ni les enlèvements – ne semble devoir intimider.

A Istanbul, tous ceux qui ont décidé de se dresser contre la dérive sanglante d’un clan concentré sur sa seule survie ont envoyé un message clair. Le CNS n’est pas moins légitime qu’un pouvoir qui n’hésite pas à recourir à tous les moyens, sur le sol syrien comme à l’étranger, comme l’attestent les témoignages que nous publions dans cette édition, pour écraser ou museler ceux qui le contestent.

La direction du CNS, composée en partie d’intellectuels reconnus, est un cinglant démenti au discours officiel syrien réduisant inlassablement la contestation qui le défie à des bandes armées, si nécessaire djihadistes.

Bâtir une maison commune, un front anti-Al-Assad, après une première tentative avortée en 2005, n’allait pas de soi. Aux clivages historiques opposant les libéraux aux islamistes, s’ajoutait la difficulté de ne pouvoir s’organiser, comme ce fut le cas en Libye en février, à Benghazi, sur une partie du territoire libérée du joug d’un appareil sécuritaire qui quadrillait le pays depuis un demi-siècle.

La création du CNS et la réaffirmation du pacifisme de l’opposition interviennent au moment où s’esquisse, çà et là, la tentation du passage à la lutte armée, qui serait utilisée avec profit par le régime pour justifier une répression décuplée. Ses antécédents plaident, si on ose dire, pour lui.

La mise en ordre de la contestation était nécessaire, mais on doute qu’elle suffise àfaire fléchir, notamment au Conseil de sécurité des Nations unies, les pays émergents, qui se réfugient lâchement dans le refus de l’ingérence dans les affaires intérieures d’autrui pour justifier un silence coupable.

A la communauté internationale, le CNS ne demande pourtant pas de faire la guerre à la famille qui a mis un pays en coupe réglée, mais plus simplement la protection de ceux qui se dressent contre elle.

Cette voix-là doit être entendue et ce message martelé. Certes, nombreux sont les experts à considérer que le régime ne survivra pas longtemps à l’épreuve et que le courage admirable de ceux qui le défient finira par payer. Cette lecture optimiste ne dispense pas d’agir. Tout ce qui pourra conforter le CNS doit être tenté.

Source : http://www.lemonde.fr/idees/article/2011/10/03/aider-ecouter-conforter-l-opposition-syrienne_1581409_3232.html#ens_id=1481132
Date : 3/10/2011