Avec les Syriens, éradiquer Daech pour une Syrie libre

Article  •  Publié sur Souria Houria le 3 décembre 2015

« L’État Islamique est loin du viseur des bombardiers russes ». C’est le titre d’un article du journal Libération du 22 novembre, dans lequel Jean-Pierre Perrin [1] a relaté de quelle façon les missiles de V.Poutine ont pris le relais des barils d’explosifs largués par l’aviation de Bachar Al Assad. En témoignent les cartes et photos-satellites [2] montrant la position des impacts des tirs russes. Ceux-ci se sont concentrés sur les zones libérées, ces territoires qui se sont affranchis de la férule de la dictature et qui ont entrepris de créer une société civile dans la perspective d’une Syrie libre.

Les missiles russes visent des cibles dans le dessein de rendre ces territoires invivables et de faire échouer leur émancipation. C’est ainsi qu’ils ont fracassé un site « stratégique » dans le but manifeste d’affamer la population, à l’instar des bombes d’Assad : « La minoterie de Binin, une localité près d’Idlib, fournissait chaque jour quinze tonnes de farine et la boulangerie industrielle voisine 5500 sacs de pain. L’une et l’autre témoignaient que la vie, certes très difficile, était encore possible dans cette région contrôlée par la rébellion. Ce pain permettait aussi à des milliers de réfugiés du sud d’Alep et du nord de la grande ville de Hama de survivre et de ne pas prendre le chemin de l’exil. Mais le 12 novembre, à 17 h 20, les Sukhoï russes ont brusquement surgi et le bombardement a commencé. Les notables du conseil local ont compté dix raids, dont deux menés avec des bombes au phosphore. Dix personnes ont été tuées et la minoterie, édifiée grâce à des subventions de Paris et l’Union européenne, s’est écroulée sous les bombes, de même que la boulangerie industrielle » [3].

Le 25 novembre [4], après que V.Poutine ait démenti une nouvelle fois avoir ciblé les populations civiles des zones libérées, ses bombes larguées le matin-même ont encore pulvérisé une boulangerie. Celles du soir ont soufflé les bureaux d’une unité rebelle et les locaux d’une future université. À ceux qui persistent à tenir tête à son protégé, Bachar Al-Assad, Moscou a rappelé que cette audace se paie au prix fort.

L’offensive militaire de l’axe Assad-Poutine-Khameneï

Conçue en connivence avec le « guide suprême » iranien Ali Khameneï, cette offensive russe est secondée par les troupes terrestres des Forces Al-Qods des Gardiens de la Révolution islamique d’Iran, par celles du Hezbollah libanais également armées par l’Iran, et par des milices irakiennes également instrumentalisées. Ces dernières s’inscrivent avec l’Iran dans la perspective d’un camp dit « chiite » symétriquement opposable à la structure autoproclamée par Daech sous la forme de l’Etat Islamique. Chacun des deux camps justifie ainsi son existence et ses exactions  par celles de l’autre ; la religion sert ici de prétexte à des luttes pour le pouvoir et l’appropriation des ressources. C’est d’ailleurs contre cette confessionnalisation que des centaines de milliers d’Irakiens ont manifesté ( cet été durant plusieurs semaines au cris de « Le confessionnalisme est mort », « Ni chiite, ni sunnite, mais laïque » et « Au nom de la religion, ils nous volent » : ce sont des slogans qu’on a pu lire sur des pancartes ou entendre scander par la foule réunie sur la place Tahrir de Bagdad pour exprimer son mécontentement face à la politique du gouvernement de Haïdar al-Abadi [5].

Selon le journal libanais l’Orient-Le-Jour [6] qui évoque ces milices irakiennes inféodées au régime iranien, « on en compte seulement entre 7 ou 8 réellement organisées, parmi lesquelles les Brigades de la paix (Saraya as-salam), l’Organisation Badr, les Brigades du Hezbollah (irakien), la Ligue des vertueux (Aassaïb Ahl al-haq), ou encore les Brigades de l’imam Ali (« Kataeb al-imam Ali« ) ». Notons que la Brigade Badr se définit comme « branche armée du Conseil suprême de la révolution islamique en Irak », et qu’elle est « aussi bien liée au gouvernement irakien qu’à la République islamique voisine, puisque considérée comme une section des Gardiens de la révolution (iraniens) ».

C’est la déroute les troupes de l’armée syrienne face aux rebelles dans la province d’Idlib qui a conduit l’Iran à majorer son dispositif déjà pléthorique d’aide au régime Al Assad. Malgré ces renforts, les territoires rebelles résistent, comme l’indiquait Le Monde [7] du 19 octobre : « Pour l’instant, deux semaines après son démarrage, cette offensive n’a enregistré aucun succès marquant. Les combats se déroulent sur deux fronts parallèles. Le premier, qui s’étend sur plus de 100 kilomètres, court du nord de Hama jusqu’aux contreforts montagneux de la province de Lattaquié, sur la côte, en passant par la plaine du Ghab et le sud d’Idlib. Les forces loyalistes, appuyées par les frappes de l’aviation russe, cherchent notamment à reprendre aux rebelles le contrôle de l’autoroute M5, qui relie Homs à Alep. Dans cette zone, les pro-Assad rencontrent une très forte résistance ».

Le but avoué de l’axe Assad-Poutine-Khameneï est de neutraliser l’opposition syrienne et d’enfermer le pays dans l’alternative Assad / Daech dont l’immense majorité des Syriens ne veut pas.

L’offensive médiatique et diplomatique des pro-Assad

Un front médiatique se déploie depuis plusieurs mois pour ringardiser la position officielle de la France « ni Daech, ni Assad » au profit du thème « entre deux maux, il faut choisir le moindre« . Il a ainsi été explicité par le numéro 2 du FN  Florian Philippot [8] dans son propos de septembre 2014 « moi je préfère les méchants aux très méchants », ajoutant « Je suis désolé de parler comme ça. On va parler à la George Bush, on est obligé d’en être là car le niveau de l’analyse diplomatique française s’est lui aussi effondré mais aujourd’hui c’est ça » et déclarant prôner « le « pragmatisme » plutôt que « l’utopie » » au motif que selon lui, « il n’existe pas d’alternative démocratique réelle à Bachar el-Assad. Le Front national assure en effet qu’il n’y a pas d’opposition à Bachar el-Assad autre que des groupes islamistes ».

Côté médias, l’émission de France Inter « Secrets d’info » de Jacques Monin du 20 novembre 2015 s’est inscrite dans la même veine en présentant comme une « enquête » les propos d’anciens collaborateurs de nos services secrets. L’émission n’a fait aucune référence aux nombreuses preuves des crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis par le régime, comme le Rapport César qui a révélé 11 000 morts sous la torture dans les seules prisons de Damas. Les « experts », journalistes ou barbouzes, rassemblés par cette émission ont prétendu que l’ALS (Armée Libre Syrienne) n’était plus aujourd’hui que « l’ombre d’elle-même » alors que la plupart des spécialistes et témoins travaillant sur la Syrie, l’évaluent aujourd’hui à environ 45 brigades pour un effectif de 60 000 combattants. Et ils en ont conclu que Assad était le seul interlocuteur.

Tout dernièrement, [9] François Fillon, ex-Premier ministre de Sarkozy et soutien affirmé de longue date de Poutine, a plaidé pour le choix d’une alliance avec Bachar Al Assad et ses alliés, incluant le Hezbollah libanais. Il a calomnié au passage l’opposition syrienne en l’accusant de ne pas lutter contre Daech. Or ce sont les bombardements de Poutine qui continuent à cibler l’opposition à Assad plutôt que Daech.
Mois après mois, cette offensive médiatique, sans scrupules sur la véracité des faits ni la réhabilitation d’un dictateur passible de la Cour Pénale Internationale, s’est amplifiée avec les visites intempestives à Damas de groupes de députés jouant les idiots utiles en se faisant photographier aux côtés de Bachar Al Assad.

Des tournées à Damas pour imposer une autre politique étrangère de la France

En février 2015, pour la première fois depuis que le régime Assad a été qualifié comme infréquentable en 2012  et comme le relate Le Monde [10], « une délégation parlementaire française s’est rendue en catimini dans la capitale syrienne. Elle y a rencontré le président Bachar Al-Assad, grand ordonnateur de la répression qui a fait des dizaines de milliers de morts depuis 2011 au grand dam du Quai d’Orsay, qui s’est nettement dissocié de cette initiative». Des élus français, au nombre de quatre, emmenés par Gérard Bapt, député PS de Haute-Garonne et président du groupe d’amitié France-Syrie à l’Assemblée nationale, ont rencontré le président Bachar Al Assad et se sont aussi entretenus avec le président du « Parlement » syrien Mohamed Jiham Laham ainsi qu’avec le mufti de la République, Ahmed Badreddin Hassoun, tous deux nommés par Assad et fidèles relais de sa propagande. « On a vu Bachar Al-Assad ce matin. Plus d’une heure. C’était très direct. Je vais faire passer les messages là où il faut, comme il le faut », a affirmé le député (UMP) Jacques Myard, membre de la délégation.

François Hollande a assuré ne pas avoir été prévenu de ce déplacement et a déploré une « rencontre entre des parlementaires français qui n’ont été mandatés que par eux-mêmes avec un dictateur qui est à l’origine d’une des plus graves guerres civiles de ces dernières années ».

En juillet 2015, c’est le député Jean-Frédéric Poisson [11], président du parti chrétien-démocrate fondé par Christine Boutin et affilié aux Républicains, qui s’est rendu à Damas pour déclarer « Une solution au conflit en Syrie doit passer par un dialogue avec Bachar al-Assad ». Il y est allé via le Liban avec Xavier Breton (LR) et Véronique Besse, élue d’un petit parti souverainiste, qui sont à la tête de groupes d’études sur le Vatican et sur les chrétiens d’Orient à l’Assemblée nationale. Parmi ses formules-choc : « Il n’appartient pas aux pays étrangers de décider qui doit diriger la Syrie, il appartient aux Syriens de décider », a-t-il martelé à l’issue d’une rencontre avec le même président du « Parlement » syrien. Au bout de 45 ans de dictature, voilà donc une trouvaille qui a étrangement échappé aux Syriens, la liberté de choisir leur destin ! Enfin, il a déclaré que l’intervention militaire russe en Syrie « permet de stabiliser pour le moment les choses et de faire reculer petit à petit le groupe État islamique ». On croirait lire un communiqué de l’agence syrienne officielle Sana.

Prenant goût aux voyages à Damas, le même Jean-Frédéric Poisson [12]a récidivé en rencontrant de nouveau le dictateur syrien le 27 octobre 2015, à nouveau sans le moindre mandat de l’exécutif français. Les lobbys pro-Assad ont aussitôt proféré des rumeurs disant que si ces parlementaires étaient partis de leur propre chef, ils avaient sans doute eu des contacts discrets avec le Quai d’Orsay.

Ces initiatives n’ont pas fait l’unanimité à droite et au centre. Ainsi a-t-on relevé les commentaires suivants dans le JDD [13] : « Le président du Modem, François Bayrou, désapprouve la visite des quatre parlementaires français à Bashar el-Assad en Syrie » en déclarant sur France Info : « C’est une démarche irréfléchie qui porte atteinte à toute la marche d’action qu’une diplomatie solide peut avoir ». Le JDD précise que sur son blog, l’ancien ministre des Affaires étrangères, Alain Juppé refuse également toute alliance avec Assad : « Certains considèrent qu’il ne faut pas mélanger morale et géo-stratégie. C’est un point de vue. Ce n’est pas le mien », ajoutant : « C’est Assad qui a fait le lit de Daech ».

Assad et Poutine font aussi illusion à gauche

Le mirage du recours à la dictature pour contrer l’État Islamique n’est pas l’apanage de la droite dure. On l’entend aussi de la part de personnalités de la gauche. Ainsi le Figaro [14] a titré en septembre 2015 : « Védrine veut s’allier à Assad contre Daech, comme « il a fallu s’allier avec Staline » ». C’est la traduction des propos de l’ancien ministre des Affaires étrangères Hubert Védrine plaidant « pour un rétablissement des rapports avec Moscou, et donc d’un dialogue avec le régime de Bachar el-Assad en vue de contenir l’État islamique ».

De même, en mars 2015, Jean-Luc Mélenchon, fondateur du Parti de gauche, a estimé [15] « qu’il fallait renouer le dialogue avec le chef de l’Etat syrien Bachar el-Assad, alors que Paris a rompu ses relations diplomatiques avec Damas en mars 2012. Comme BFMTV et RMC lui demandaient s’il fallait parler avec lui, l’eurodéputé s’est exclamé : « Évidemment ! Avec qui voulez-vous parler ? », ajoutant : « La France et quelques pays ont retiré leurs représentations diplomatiques de Syrie, à quoi ça avance ? Qu’est-ce qu’on a fait bouger grâce à ça ? » et précisant : « On discute avec les gens qui sont en guerre, sinon ce n’est pas la peine d’essayer de faire la paix », et concédant que certes on a accusé le président syrien « de tout, et une partie était plus que vraie ». De même encore, selon L’Humanité [16] : « le ministère français des Affaires étrangères peut bien continuer à asséner que « la position de la France est constante, nous ne discutons pas avec Assad« , il n’en reste pas moins qu’hier quatre parlementaires français en « mission personnelle«  en Syrie ont rencontré à Damas le président syrien ».

Ses propos ont provoqué des remous au sein même du Front de Gauche ; ainsi une des autres composantes, le mouvement « Ensemble » se démarque de ces ralliements décomplexés ou résignés à une solution passant par la case dictature. Ensemble écrit : « Le régime syrien est-il, comme veulent le croire certains, l’ennemi de Daech ? (…) Le prétendre, c’est ne pas voir que les premiers djihadistes ont été libérés par lui de ses prisons, pour faire d’eux l’épouvantail justifiant un nécessaire soutien à son régime…Comment ne pas s’interroger sur une évidente coordination entre le régime et Daech ? ».

Conférence de Vienne [17] et pourparlers sous l’égide de l’ONU

Les réunions successives ont buté sur une divergence majeure concernant la présence ou non de Bachar Al Assad dans les scénarios projetés [18]. Les communiqués de novembre 2015 n’ont pas enregistré d’avancée significative par rapport au précédent qui avait mis le cap sur « l’instauration d’un cessez-le-feu dans toute la Syrie, la relance de négociations sous l’égide des Nations unies entre le gouvernement et l’opposition et  la tenue de nouvelles élections ». La problématique d’un solide contrôle international et d’un scrutin étendu à tous les Syriens, qu’ils soient dans le pays ou à l’extérieur (réfugiés notamment), a constitué une autre pierre d’achoppement.

Certes, le 25 novembre, le porte-parole de Ban Ki Moon, secrétaire général de l’ONU,  a dit avoir finalement obtenu que des représentants du gouvernement syrien et de l’opposition se réunissent à Genève le 22 janvier pour tenter de trouver une solution politique à ce conflit après trente-deux mois de conflit, avec les attendus suivants : « Le secrétaire général des Nations unies réunira la conférence de Genève sur la Syrie le mercredi 22 janvier, amenant à la table des négociations à la fois le gouvernement syrien et l’opposition pour la première fois depuis le début du conflit ».

Le Monde précise que la Coalition nationale syrienne (CNS), représentant notamment l’opposition laïque,  envisage d’y participer sous réserve de prérequis. D’une part, elle indique : « Il faut que le régime laisse rentrer de l’aide humanitaire dans les quartiers qu’il assiège et qu’il libère des femmes et des enfants ». D’autre part, elle précise dans un communiqué mardi 22 novembre que Bachar Al-Assad et « tous les criminels responsables du meurtre du peuple syrien dans l’instance de pouvoir » ne devaient jouer aucun rôle dans la phase transitoire et dans « l’avenir politique de la Syrie ».

L’aventure d’une coalition étendue anti-Daech avec Assad et la Russie

Après les attentats du 13 novembre, l’opinion française est sommée de se rallier au projet d’une coalition de pays pour une campagne de frappes aériennes contre Daech. La Russie se fait prier et veut bien envisager une superstructure dès lors qu’elle ne remet pas en cause ses arrangements avec Bachar Al Assad. On se dirige alors vers la situation d’un ciel syrien sillonné par des dizaines d’aéronefs tant syriens, russes, européens, qu’américains, et d’un sol syrien fracassé par des centaines de missiles  au motif de neutraliser Daech. Certes, il est utile de pouvoir cibler ses dépôts de munitions et ses caravanes de camion-citerne charriant le pétrole vendu en contrebande. Mais le vaste périmètre de l’État autoproclamé n’est pas peuplé que de « Jihadistes ». Maints habitants de ces territoires n’ont pas pu fuir et sont exposés à la foudre des pays de la coalition venue du ciel.

Cependant, sous les coups de boutoirs des différents ténors plaidant pour une grande coalition incluant la Russie et l’Iran, on est sommé d’en approuver le projet au nom des actuels périls.

Ainsi, Laurent Fabius a préconisé le 27 novembre, outre les bombardements, « des forces au sol qui ne peuvent pas être les nôtres, mais qui peuvent être à la fois des forces de l’Armée syrienne libre, des forces arabes sunnites, et pourquoi pas des forces du régime, et des Kurdes également bien sûr », ce qui lui a valu [19] un satisfecit du chef de la diplomatie syrienne, Walid Mouallem. Le soir-même, il a nuancé son message en déclarant qu’une participation des forces du régime syrien ne pouvait être envisagée que « dans le cadre de la transition politique », et que le président Al-Assad ne pouvait pas « faire partie de l’avenir de la Syrie ».

Éradiquer Daech et mettre enfin le cap vers une Syrie libre

Comme l’explique le Pr Jean-Pierre Filiu interrogé par Le Monde [20] le 18 Novembre à propos de l’ascension de Daech : « … Pour ne parler que de la période la plus récente, trois décisions ou non-décisions internationales se sont traduites par une envolée du nombre des recrues de Daech. Il y a d’abord, en août 2013, le refus d’Obama d’intervenir après l’utilisation des armes chimiques par le régime de Bachar Al-Assad. Daech met alors des photos des enfants gazés sur tous ses sites en disant : « Voilà le monde et voilà ce qu’on fait aux musulmans dans le monde. Si vous êtes une bonne musulmane, un bon musulman… ». C’est la première fois que Daech recrute sur une base “humanitaire”.

Deuxième temps, août 2014, quand la coalition se contente de bombardements aériens : une situation idéale pour Daech. L’organisation compense très largement les pertes infligées par un recrutement accru.

Troisième temps, dont nous venons de payer le prix dans les rues de Paris, c’est l’entrée en jeu de Poutine et d’une forme renouvelée de la guerre sainte, avec sur le terrain des supplétifs iraniens et chiites. Il faut savoir que les avions militaires russes sont bénis par l’Église orthodoxe avant leurs missions ».

Lorsque Jean-Pierre Filiu annonce [21] dans Le Point que « le totalitarisme de Daech finira par céder », il se base sur l’analyse suivante : « je replace les évolutions en cours dans les tendances de longue durée. L’émergence de Daech est directement liée à la dynamique contre-révolutionnaire de régimes prêts à tout, en Syrie, au Yémen ou en Égypte, pour refuser la moindre concession. Or ce processus contre-révolutionnaire aboutit partout à une effroyable impasse en termes humains et financiers, aggravée par la chute spectaculaire des cours du pétrole. Le modèle contre-révolutionnaire n’est pas tenable et Daech entrera en crise avec lui. Comme tous les groupes totalitaires avant lui, Daech aura en outre à gérer le choc de la réalité (…). Ce sont les peuples arabes, et eux seuls, qui pourront défaire Daech. Il est grand temps de le comprendre dans les capitales occidentales et d’apporter le soutien indispensable à ces forces populaires, plutôt qu’à des dictatures condamnées à court ou moyen terme ».

De même, lorsqu’il pronostique dans Le Monde : « Contre Daech, le temps est désormais compté », il s’explique ainsi : « On peut gagner cette guerre. Daech, c’est 30 000 combattants, 5 000 Européens, et une idéologie qui peut se démonter en un recto verso. Simplement, il faut s’en donner les moyens. Il faut commencer par faire mentir les prophéties et donc leur infliger au plus vite une défaite carabinée. Sans s’allier pour autant avec les Russes – ni avec Bachar Al-Assad, qui n’apporte rien à la guerre contre Daech. On peut reprendre assez vite les territoires tenus en Syrie par Daech. Et il faut plus que jamais aider et soutenir les “révolutionnaires syriens” qui combattent à la fois Daech et l’armée de Bachar Al-Assad. Ce sont les seuls à pouvoir l’emporter sur le terrain. Envoyer des troupes occidentales serait tomber dans l’énorme piège que nous tend Daech ». Après dit-il, « il faut évidemment donner la parole aux victimes musulmanes, qui sont l’écrasante majorité, et aux dissidents de l’organisation qui ne peuvent renouer avec la vie qu’en dénonçant ce qu’ils ont vu. Et là, à mon avis, sur le plan militaire et sur le plan de la communication, on peut reprendre l’initiative assez vite, mais le temps est compté, parce que, pour l’instant, ce sont eux qui décident du calendrier, qui fixent les priorités et on voit bien qu’ils nous ont porté un coup terrible ».

L’urgence est en effet à ne pas échafauder de « solution » à l’insu des Syriens, mais au contraire à redonner l’initiative à ceux d’entre eux qui au Printemps 2011ont tracé des voies d’avenir.

Gérard Lauton pour Memorial 98

Articles précédents de Gérard Lauton pour Memorial 98:

Voir aussi, depuis le début de la mobilisation du peuple syrien en mars 2011, les nombreux articles de Memorial 98 concernant la  Syrie ici et sur le blog d’actualités « L’Info Antiraciste », dont :


[1]
http://www.liberation.fr/planete/2015/11/22/en-syrie-l-etat-islamique-loin-du-viseur-des-bombardiers-russes_1415322.

[2]
http://www.memorial98.org/2015/10/poutine-et-assad-une-alliance-pour-massacrer-les-syriens.html.

[3]
Idem.

[4]
http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2015/11/26/a-alep-les-frappes-tres-ciblees-de-l-aviation-russe_4818023_3218.html.

[5]
http://observers.france24.com/fr/20150812-irak-mouvement-anti-gouvernement-clivages-confessionnels.

[6]
http://www.lorientlejour.com/article/940162/les-milices-chiites-irakiennes-ces-autres-acteurs-de-la-lutte-contre-lei.html.

[7]
http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2015/10/19/l-iran-envoie-des-troupes-au-sol-pour-appuyer-l-offensive-russe_4792305_3218.html.

[8]
http://lelab.europe1.fr/Florian-Philippot-sur-le-soutien-du-FN-a-Bachar-el-Assad-moi-je-prefere-les-mechants-aux-tres-mechants-16666.

[9]
Billet du 25 novembre d’Albert Herszkowicz sur sa page Facebook.

[10]
http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2015/02/25/des-parlementaires-francais-ont-rencontre-bachar-al-assad_4582844_3218.html.

[11]
http://www.ouest-france.fr/monde/elus-francais-damas-un-depute-juge-assad-incontournable-3797720.

[12]
http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2015/10/26/des-deputes-francais-de-droite-vont-rencontrer-bachar-al-assad_4797323_3218.html.

[13]
http://www.lejdd.fr/Politique/Alain-Juppe-C-est-Assad-qui-a-fait-le-lit-de-Daech-720080.

[14]
http://www.lefigaro.fr/politique/le-scan/citations/2015/09/28/25002-20150928ARTFIG00200-vedrine-veut-s-allier-a-assad-contre-daech-comme-il-a-fallu-s-allier-avec-staline.php.

[15]
http://www.rtl.fr/actu/politique/syrie-melenchon-estime-qu-il-faut-discuter-avec-assad-7777068400       .

[16]
http://www.humanite.fr/al-hassad-rencontre-des-parlementaires-francais-566777.

[17]
http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2013/11/25/syrie-conference-de-paix-prevue-le-22-janvier_3519885_3218.html.

[18]
http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2013/11/25/syrie-conference-de-paix-prevue-le-22-janvier_3519885_3218.html.

[19]
http://www.liberation.fr/planete/2015/11/27/syrie-le-virage-de-laurent-fabius_1416760.

[20]
http://www.lemonde.fr/le-club-de-l-economie/article/2015/11/18/jean-pierre-filiu-travaille-contre-daech-le-temps-est-desormais-compte_4812431_4795074.html.

[21]
http://www.lepoint.fr/monde/jean-pierre-filiu-ce-sont-les-peuples-arabes-qui-pourront-defaire-daesh-27-08-2015-1959750_24.php.