En Syrie, la Révolution pour la Liberté entre dans sa septième année par Anas Al-‘Abdéh

Article  •  Publié sur Souria Houria le 24 mars 2017

En Syrie, la Révolution pour la Liberté entre dans sa septième année

par Anas Al-‘Abdéh, Président de la Coalition Nationale Syrienne

in al-Sharq al-Awsat, 20 mars 2017 – أنس العبدة: ثورة الحرية نحو عامها السابع traduit de l’arabe par Marcel Charbonnier

 

La Révolution syrienne vient d’entamer sa septième année, laissant derrière elle six années qui ont changé le visage non seulement de la Syrie, mais aussi du Moyen-Orient – et même du monde. Année après année, ce sont six années qui se sont ainsi écoulées, pleines de difficultés et de retournements. Malgré cela, malgré les tueries, malgré la terreur, malgré l’épuration ethnique, malgré les arrestations innombrables, les emprisonnements et les différentes formes imaginables et inimaginables que puisse prendre le crime, une chose, une seule, est demeurée une constante inflexible : la résistance du peuple syrien et sa volonté de vaincre en dépit de dissensions et de divergences de vues entre Révolutionnaires. Le seul axe sur lequel se sont effacées toutes les différences et sur lequel ont fusionné toutes les aspirations, c’était – cela reste aujourd’hui et cela restera, demain – la liberté, la justice et la dignité pour tous les citoyens syriens.

La marche en avant de la Révolution syrienne se poursuit. Elle ne s’arrêtera pas. Elle ne prendra pas fin avant d’avoir atteint ses objectifs. Les moyens pourront varier, les personnalités politiques aussi, la marche en avant pourra encore connaître des reculs et des victoires, mais la victoire finale du peuple syrien – il en va pour ce peuple comme pour tous les peuples – est une certitude historique incontournable. La chute des oppresseurs, des tyrans et des dictateurs en est la condition sine qua non.

La liberté, la justice et la dignité furent et restent les principes fondateurs de la Révolution syrienne. Mais avant d’atteindre ces objectifs,  il y a de nombreux obstacles auxquels nous ne saurions échapper et que nous ne saurions sous-estimer : avant de pouvoir mettre ces principes en application, il est indispensable de renverser le régime dictatorial, de chasser Bachar al-Assad du pouvoir et de l’empêcher de rétablir son ascendant sur le destin du peuple syrien. La Syrie ne pourra échapper au sort qui est aujourd’hui le sien et passer à une situation plus acceptable tant qu’il n’aura été mis un terme à ce régime dictatorial, tant qu’on ne l’aura pas fait chuter.

De même, l’instauration de la liberté et le rétablissement de la dignité, ne suffiront pas, à eux seuls, si la justice n’est pas garantie : le passage en jugement de tous ceux qui ont commis des crimes contre le peuple syrien (à commencer par Bachar al-Assad et sans oublier tous ceux qui ont assassiné des civils) est absolument indispensable. En matière de crimes contre un peuple entier, il ne saurait y avoir de prescription. Seuls les hommes libres ont droit à la liberté, pas des criminels. Comment un monde dans lequel des criminels (ayant recouru y compris aux armes chimiques) seraient autorisés à aller et venir librement pourrait-il représenter un futur envisageable ?

Mais la communauté internationale est confrontée à un véritable examen, face au problème syrien. Son échec à s’emparer à bras-le-corps de ce dossier reste patent et cela contribue à rendre de plus en plus complexes les solutions possibles. La facture de l’échec continue à être acquittée en sang de Syriens innocents répandu et la politique internationale persiste à ne prendre d’initiatives qu’au service d’intérêts à courte vue. Ainsi, en dépit de la focalisation des médias et des discours sur le « terrorisme », les pas concrets qui permettraient de lutter contre lui, de l’éradiquer et d’en assécher les sources financières et celles des régimes qui en sont les parrains ne bénéficient nullement de l’importance et du sérieux qui devraient être de mise. Ce manque de sérieux comporte en lui les germes de crises futures, il ouvre la porte à des catastrophes d’encore plus grande ampleur.

Faire face aux crises et aux problèmes qui se dressent aujourd’hui sur le chemin de l’humanité n’est pas un choix, c’est une mission qui engage le destin : il est indispensable de déployer tous les efforts possibles pour réussir à les résoudre aussi tôt que possible. Demain est en passe de devenir invivable dès lors que nous n’aurions pas regardé en face les réalités d’aujourd’hui de manière rationnelle et avec lucidité.

Il est indispensable de mettre en garde très clairement sur le fait que le terrorisme n’est en lui-même que le véritable visage des régimes qui le réchauffent en leur sein puis l’utilisent. En effet, après leur échec à se confronter au monde en usant du langage du vingt-et-unième siècle, voici que, désormais, ces mêmes régimes défient la communauté internationale, terrorisant le monde entier au moyen de [leur] terrorisme, utilisant celui-ci comme une arme bien réelle pour obtenir ce qu’ils ont échoué à réaliser par d’autres moyens, ce sur quoi ils amassent [paradoxalement] de nouveaux acquis politiques, et encore davantage d’entregent.

Non, la guerre n’est plus la poursuite de la politique par d’autres moyens. Désormais, c’est le terrorisme que ces régimes dictatoriaux choisissent comme moyen pour faire passer leurs politiques dans la réalité sans que les autres membres de la communauté internationale aient conscience de la gravité du danger qui ne manquera pas de découler de leur capitulation face à cette provocation.

Est-il nécessaire, aujourd’hui, tandis que nous entrons dans une septième année d’une Révolution héroïque, que nous réaffirmions que l’origine du terrorisme en Syrie et au Moyen-Orient n’est autre que le régime Assad. Quel prix les Syriens devront-ils encore payer avant que le monde comprenne – enfin ! – l’ampleur du mal inhérent à ce régime et au régime iranien, qui en tire les ficelles et qui en soutient les exactions, ce régime qui n’a, jusqu’à ce jour encore jamais été visé ne serait-ce que par une seule offensive de l’organisation Da‘esh ?

Quel prix devra payer le peuple syrien avant que le monde prenne conscience du danger pour lui de se taire sur les violations incessantes du droit international, cela d’autant plus qu’il y a deux membres permanents du Conseil de Sécurité qui disposent du droit de veto, dont ils usent afin de protéger les régimes terroristes et tyranniques dans le monde entier, tandis que les autres membres sont incapables de fournir une protection minimale au peuple qui réclame la liberté, ce peuple qui a contribué, il y a soixante-dix ans, à créer l’organisation internationale et à en rédiger la charte fondamentale !

Quoi qu’il en soit, avec le début de la septième année de notre Révolution contre le régime de Bachar al-Assad et après les longues expériences – amères – que nous avons eues avec la communauté internationale, l’attente d’une quelconque solution raisonnable ou de la mise en application d’une quelconque décision, d’une quelconque promesse ou d’une quelconque menace n’a désormais plus aucune importance pour les Syriens, auxquels ne s’offre aujourd’hui aucun choix facile. Ils sont confrontés à une réalité internationale qu’ils ne sauraient nier et dont ils ne sauraient en aucun cas détourner les yeux. Aujourd’hui, nous, les Syriens, nous ne saurions attendre de solutions que nous n’aurions pas nous-mêmes choisies et que nous n’imposerions pas par nous-mêmes.

Nous exigeons la fin des combats, la libération des prisonniers et la sortie du territoire syrien de toutes les forces étrangères d’occupation qui font la guerre au peuple syrien, afin que la Syrie redevienne pour son peuple un pays libre, uni et indépendant.

Nous soutenons le cessez-le-feu et nous nous y engageons. Nous soutenons la solution politique. Nous sommes d’accord avec les décisions internationales. Nous sommes en faveur de la transition politique. Tout cela a été réaffirmé au cours de la dernière session des négociations à Genève : rien de ce que demandent les Syriens n’est impossible, rien de ce que demandent les Syriens n’est exorbitant. Ce qu’il faut, c’est un processus de transition politique crédible qui offre aux Syriens un point d’entrée dans une instance de gouvernance de transition jouissant de toutes les prérogatives et respectant les principes de la déclaration de Genève et des résolutions internationales [2209 et 2234, ndt] en vue de la réalisation d’une transition politique digne des sacrifices qu’ils ont consentis – d’une transition qui permette de mettre fin à une anarchie terrifiante que le régime Assad a créée sous supervision et avec participation iraniennes dans l’intention de terroriser le monde entier, de le soumettre à son chantage et de l’amener à capituler.

Pour les Syriens, il n’y a toujours strictement rien d’impossible. La guerre est désormais ouverte. Entre le peuple syrien, d’un côté, et de l’autre, le régime Assad et l’Iran.

Tous les moyens légaux pourront être choisis. Les objectifs des Syriens seront atteints et les Syriens vivront leurs droits comme une réalité sur le terrain, que cela ait été imposé d’un seul coup ou que cela ait été obtenu au travers de nombreuses étapes dans leur combat.

Les Syriens oeuvrent à ce que le sang cesse de couler dès aujourd’hui, à ce que les prisonniers soient libérés sur-le-champ, à ce que le monde prenne conscience de l’ampleur de la catastrophe avant qu’il ne soit trop tard et qu’il contribue à imposer une solution politique juste respectant les résolutions des Nations unies.

Tant que cela ne se sera pas produit, le sang des Syriens deviendra une malédiction dont le monde entier paiera le prix, comme il paiera le prix de son silence face aux crimes de la dictature de Bachar al-Assad.