Honte à l’Occident qui ferme les yeux sur le massacre en Syrie – par Wajd Zimmermann

Article  •  Publié sur Souria Houria le 27 avril 2013

Wajd Zimmermann, présidente des Femmes syriennes pour la démocratie, accuse la communauté internationale de rester silencieuse face aux atrocités quotidiennes commises par le régime syrien.

Le 21 avril 2013, le régime syrien a commis un nouveau massacre à Jdaydeh-Artouz, au sud-ouest de Damas. Des centaines de civils ont ainsi trouvé la mort de la façon la plus barbare; certains tués à l’arme blanche, à la hache ou exécutés par balle, d’autres brûlés vifs. Ce jour-là, des familles entières ont été ex­terminées: femmes, enfants et vieillards en majorité. Ce massacre a été perpétré, comme tous les massacres précédents, après que leur village eut été assiégé et bombardé par l’armée du régime, la garde répu­blicaine, les forces de «sécurité» et les chabiha (milices armées du régime).

A ce jour, nous n’avons pourtant vu que quelques articles dans la presse occidentale, relatant que 80 personnes avaient été tuées dans ce village, alors même que, sur les pages des réseaux sociaux, les hommes du régime se vantent d’en avoir tué 400! De leur côté, les comités locaux de coordination ont annoncé 566 martyrs en Syrie ce jour-là, dont 483 morts dans Damas et ses environs, la majorité à Jdaydeh-Artouz*.

Sur Facebook, les Syriens expriment leur amertume et leur incompréhension. Ils ont l’impression que la communauté internationale, par son silence assourdissant, leur fait payer un prix extrêmement élevé en vies humaines leurs revendications en termes de droits humains; et que cette communauté internationale vient ensuite leur proposer de l’aide humanitaire, distribuée au compte-gouttes, par l’intermédiaire et au bon vouloir du tueur, le régime lui-même (via le CICR).

Le massacre du 21 avril fait suite et n’est que la conséquence de la réunion des «amis» de la Syrie, qui a eu lieu à Istanbul la veille et qui a renouvelé son assurance au régime syrien qu’aucune action ne serait entreprise contre lui.

Durant cette réunion, les Américains ont offert au conseil militaire de l’Armée syrienne libre (ASL) une aide militaire non létale, alors que l’ASL doit faire face aux missiles balistiques et à toutes sortes de bombes interdites (à sous-munitions, à clous, à tête chimique et autres «vacuum weapon»). Cette aide lui sera certainement utile pour autant que le peuple et l’ASL parviennent à rester en vie malgré toutes les tentatives d’extermination massive.

 Sur les pages syriennes des réseaux sociaux, nous voyons apparaître des pancartes de la rue syrienne qui disent: «Aujourd’hui, il n’y a eu que 300 personnes tuées par le régime, mais sans armes chimiques, alors, SVP, il n’y a pas de quoi déranger la communauté internationale.» D’autres pages publient une caricature de l’aide internationale, symbolisée par une paire de chaussures offerte à l’opposition, personnifiée par un cul-de-jatte! L’aide humanitaire supplémentaire offerte par les Etats-Unis, le 20 avril 2013, s’élève à environ 25 millions de dollars, ce qui représente un versement unique de 5 dollars par personne; et ce au regard de 1 million de réfugiés dans les pays voisins et de 4 millions de déplacés internes. Quelle farce!

Trois morts à Boston ont mobilisé toute l’attention des médias occidentaux et suscité une multitude de minutes de silence. Des centaines de morts en Syrie en un jour, massacrés sauvagement, n’ont même pas fait l’objet d’une annonce correcte, et aucune manifestation populaire n’est venue condamner ces crimes.
Le silence des médias et des gouvernements rend l’Occident complice des crimes contre l’humanité en Syrie, honte à eux.
Aujourd’hui, une catastrophe humanitaire sans précédent est provoquée par un régime mafieux et criminel – qui, depuis quarante ans, confisque la moitié du PIB syrien – prêt à détruire la Syrie et exterminer une bonne partie de la population pour rester au pouvoir. Ceci avec l’aide et le renfort de la Russie, de l’Iran, de Hezbollah, et la complicité tacite de ceux qui sont en position d’agir et de condamner.
L’ONU et le Conseil de sécurité ont failli à leur devoir de protéger les civils en Syrie et sont ainsi de­venus complices de crimes contre l’humanité. Les Etats-Unis sont quant à eux davantage intéressés au pétrole du Golan – ils ont signé un contrat avec Israël en février de cette année – qu’à la protection des civils syriens. Ainsi refusent-ils d’utiliser les missiles patriotes pour protéger les civils du nord de la Syrie.
La population syrienne n’a ni protection directe, ni couloir humanitaire pour se sauver si nécessaire, ni zone sécurisée, ni aide militaire pour pouvoir se protéger. Au contraire, un embargo d’armes a été imposé à l’ASL alors que les armes affluent toujours de la Russie et de l’Iran à destination du régime.
Aujourd’hui, en Syrie, patrie du premier alphabet, il n’y a pas que les humains qui sont en danger, mais la mémoire de l’humanité tout entière, car les sites historiques sont bombardés et pillés. André Parrot, archéologue et ancien directeur du Louvre, disait: «Chaque homme a deux patries: la sienne et la Syrie.» Citoyennes et citoyens du monde entier, ne laissez pas Assad détruire votre deuxième patrie, ne le laissez pas vous priver de votre mémoire commune… Descendez dans les rues et exigez de vos gouvernements qu’ils agissent vite pour sauver la Syrie!

source : http://www.letemps.ch/Page/Uuid/fa558f4c-ac2f-11e2-a5e3-37f440f5d881/Honte_à_lOccident_qui_ferme_les_yeux_sur_le_massacre_en_Syrie#.UXuNuxzt-zg

date : 24/04/2013