La Turquie et la question syrienne par Omar Al Assaad

Article  •  Publié sur Souria Houria le 25 avril 2015

La Turquie et la question syrienne avec Didier BillionBayram Balci par Omar Al Assaad – Traduit par R.S. pour Souria Houria

Photo_عمر الأسعد

Une nouvelle rencontre dans le cadre des réunions régulières organisées par Souria Houria, dirigées par l’écrivain et éditeur Farouk Mardam Bey, qui recevait cette semaine l’écrivain et journaliste syrienne Hala Kodmani, le chercheur Didier Billion et l’académicien et chercheur turc spécialiste de l’islam politique en Turquie Bayram Balci. Le titre de cette rencontre est «  la Turquie et la question syrienne ».

Kodmani a commencé par un témoignage sur son dernier voyage à Alep, au nord de la Syrie, soulignant le rôle important des militants civils et des journalistes indépendants sur le terrain en insistant sur l’importance de les soutenir et  décrivant la situation sur place de douloureuse. Les gens vivent dans des conditions et des règles imposées par la guerre. Le nombre de personnes encore sur place varie entre 300-400 000. Elle a décrit leur quotidien et la résistance de nombreuses familles qui  refusent de quitter malgré les conditions difficiles. Kodmani a également évoqué la situation dramatique des enfants à Alep aujourd’hui, surtout en l’absence de soins sanitaires et d’écoles. Elle a souligné le rôle du conseil local, des volontaires de la protection civile et des éboueurs qui continuent leurs missions de secourir les gens et de leur présenter un certain nombre de service suite au bombardement de la ville.

Elle a décrit la vie quotidienne des familles qui vivent à Alep jusqu’à ce jour et l’ampleur du choc suite à la destruction causée par le bombardement de la ville ainsi que les tueries quotidiennes en raison des snipers et de l’intensification des combats la plupart du temps.

A son tour le chercheur français Didier Billion spécialiste des questions turcs a parlé des grandes lignes de la position turque vis-à-vis du dossier syrien rappelant que la politique régionale et étrangère de la Turquie vis-à-vis de la Syrie dans le passés’accordait avec une politique de « zéro problème » proposéen ce temps-là par l’ex ministre des affaires étrangères turc Ahmed Daoud Oglo, actuellement Premier Ministre, mais que cette politique n’étais pas appropriée  dans une région en ébullition comme le Moyen Orient avec des voisins comme la Syrie, l’Irak et l’Iran. Billion a également rappelé que la relation entre la Turquie et la Syrie n’était pas chaleureuse durant tout le 20eme siècle et fut entachée par un grand nombre de complications durant les différentes étapes. Le pire de ces crises est peut-être en 1998 où la Turquie a rassemblé  son armée a la frontière syrienne suite à l’accueil d’Abdullah Ocalan, leader du PKK,  en tant que refugié à Damas.

Après l’insurrection syrienne, considéré par Billion comme la deuxième étape des relations turco syrienne, la Turquie aurait préféré une situation stable à sa frontière sud, très étendue avec la Syrie, ce qui explique que les  6 premiers mois de la révolution il y a eu des visites diplomatiques intensives de responsables turcs à Damas dans le but de faire pression sur le régime pour des solutions plus diplomatiques mais ils n’ont pas reçus de signes positifs, ce qui a poussé le gouvernement turc à changer de tactique et à appuyer la révolution, d’autant plus que le dossier syrien était devenu important et influençait la politique intérieure turque entre ceux du parti « justice et développement » qui détiennent principalement le pouvoir et les opposants de la position officielle turc en Syrie que sont les opposants au gouvernement de « justice et développement ».

Billion a signalé que les premières réunions de l’opposition à Istanbul ont donné le ton sur la politique côté turc dans le dossier syrien ainsi que les différentes déclarations sans équivoques des responsables turcs, à commencer par Rajab Tayeb Ardogan, qui ont confirmé la position vis avis de la question syrienne.

Billion a ajouté que les développements sur le terrain dont les plus importantes sont l’apparition de Daech aux frontières entre la Syrie et la Turquie ainsi que la croissance de l’influence de Front Al Nosra n’ont pas changé la position turque qui a insisté sur le fait que la base de la guerre contre le terrorisme serait, en premier, d’évincer  Bachar El Assad et il  apparait que c’est cette priorité que la Turquie a adopté dans sa politique et qu’elle y tiens toujours.

Billion a également expliqué un certain nombre de points qui ont pesé sur la politique turque dans le dossier syrien, le plus important étant la question kurde et sa relation avec les kurdes en générale que ce soit en Turquie ou avec ceux derrière les frontières en Syrie et en Irak. Il a signalé les divergences internes en Turquie au sujet de la position du gouvernement vis-à-vis du dossier syrien en plus d’une division  à l’intérieur de la société turque concernant ce dossier dû à la présence de groupes qui soutiennent le régime d’Assad se basant sur leur mauvaise relation avec le pouvoir turc.

A son tour, le chercheur et académicien turc Bayram Balci, a parlé des problématiques fondamentales qui ont influencé la politique turque vis-à-vis du dossier syrien durant la précédente période, en  premier le problème kurde car la politique d’Erdogan a toujours été influencée par la question kurde que Balci décrit comme une des question inquiétante pour la Turquie et son gouvernement, d’autant plus que la relation de la Syrie avec la question kurde en Turquie n’a pas toujours été en faveur des turques. Le leader du PKK Abdullah Ocalan avait souvent reçu, lui et ses collaborateurs, le soutien du régime syrien, et cette relation a souvent été exploitée par le régime de Damas pour faire pression sur le côté turc. Les différentes politiques turcs ont toujours tenté d’écarter le régime syrien des problèmes de la question kurde  considérant  ce dossier comme un problème interne turc qu’il faut isoler des influences de la politique regionale.

Balci a également signalé le problème religieux et son impact sur la gestion du dossier syrien par la Turquie surtout avec la prédominance des sunnites en Turquie face à une minorité alaouite comparable à la composition de la société syrienne. Cette minorité a toujours eu de mauvaises relations avec le pouvoir dû au fait qu’elle n’a pas pu obtenir un certain nombre de ses droits, ce qui a abouti à un vaste mouvement de réclamation de sa part et  le  gouvernement turc a tenté de répondre à une partie de ces réclamations.

Balci a considéré que les problèmes kurdes et alaouites dans la société turque éclaircissaient la position officielle turque du dossier syrien et la nature des prises de positions à son encontre.

Balci a parlé des politiques erdoganesques et particulièrement de la relation avec les Etats Unis dans le dossier syrien puisque le combat du terrorisme est devenu dernièrement la priorité américaine alors que la Turquie insiste sur sa priorité d’évincer Assad du pouvoir, il a également mentionné la divergence entre américains et turc au sujet de l’Egypte surtout après le retour du régime militaire au pouvoir ce qui provoque des réactions très susceptibles dans les milieux politiques turques ayant longtemps souffert de coup d’états militaires dans le passé.

version en arabe : تركيا والمسألة السورية – عمر الأسعد