Les « Amis de la Syrie » doivent user de leur influence pour enrayer la spirale de répression et de violence.

Article  •  Publié sur Souria Houria le 10 juillet 2012

Manifestation en soutien du peuple syrien © Amnesty International

Amnesty International demande l’instauration immédiate d’un embargo sur les armes afin de stopper le transfert d’armes à destination du gouvernement syrien, la saisine du procureur de la Cour pénale internationale (CPI) par le Conseil de sécurité concernant la situation dans le pays, et le gel des avoirs du président Bachar el Assad et de ses proches collaborateurs.

Alors que des informations de plus en plus nombreuses font état d’exactions commises par l’opposition armée, les États doivent aussi stopper les transferts d’armes à destination des opposants, lorsqu’il existe un risque substantiel qu’elles soient utilisées pour commettre des crimes de guerre et d’autres violations des droits humains.
En outre, Amnesty International sollicite la présence d’observateurs indépendants des droits humains, chargés de surveiller, d’enquêter et de rendre compte publiquement des crimes contre l’humanité, des crimes de guerre et des graves atteintes aux droits humains commises par toutes les parties.

 

En exergue :

Le temps des discours et des hauts cris sur la situation catastrophique de la Syrie est depuis longtemps révolu, sachant que plus de 12 000 personnes ont déjà péri au cours de 16 mois de manifestations et de troubles, – Ann Harrison, directrice adjointe du programme Afrique du Nord et Moyen-Orient d’Amnesty International.
Les « Amis de la Syrie », avec à leur tête la France, les États-Unis, le Royaume-Uni, l’Allemagne et les nations arabes de l’Arabie saoudite et du Qatar, sont un groupe de contact qui rassemble des représentants d’organisations internationales et de plus de 60 États, pour la plupart des membres de l’Union européenne et de la Ligue arabe. Il s’efforce de coordonner les efforts de l’Occident et du monde arabe afin de mettre un terme à la violence en Syrie.Les Amis de la Syrie doivent repartir de cette rencontre en France avec un plan précis visant à mettre fin aux crimes relevant du droit international et à garantir aux victimes un accès à la justice, à la vérité et à des réparations complètes. Ils doivent exercer leur influence sur le Conseil de sécurité de l’ONU pour qu’il saisisse enfin la CPI de la situation en Syrie, instaure un embargo sur les armes qui prohibera tout transfert d’armes et d’équipements connexes au gouvernement syrien et gèle les avoirs du président Bachar el Assad et de ses principaux collaborateurs.

Tout État qui envisage de fournir des armes à des combattants de l’opposition pour la protection des civils doit effectuer une évaluation rigoureuse des risques fondée sur des informations objectives afin de s’assurer que ces armes ne seront pas susceptibles de servir à perpétrer ou favoriser des crimes de droit international, des crimes de guerre ou d’autres graves atteintes aux droits humains. Si ce risque substantiel existe, il convient de bloquer ces transferts.

Ce critère, baptisé la « Règle d’or » en matière de régulation des transferts d’armes, est au cœur des négociations sur un traité mondial sur le commerce des armes, qui se déroulent actuellement à l’ONU à New York.
Le Tribunal spécial pour la Sierra Leone a récemment rendu son jugement concernant l’ancien président libérien Charles Taylor, aux termes duquel tout représentant d’un gouvernement ou toute personne qui fournit des armes à des forces gouvernementales ou à des groupes armés d’opposition, tout en sachant que ces armes sont susceptibles d’être utilisées pour commettre des crimes de guerre ou des crimes contre l’humanité, devrait faire l’objet de poursuites pénales en tant que complice de ces crimes.

La Russie, qui a opposé avec la Chine à deux reprises son veto à une résolution du Conseil de sécurité sur la Syrie et est le principal fournisseur d’armes du gouvernement syrien, a annoncé qu’elle n’assisterait pas à la rencontre de Paris.

Atteintes aux droits humains commises par les deux parties

Si l’immense majorité des crimes ont été commis par les forces de sécurités syriennes durant plus de 16 mois de manifestations et de troubles, Amnesty International a reçu un nombre croissant d’informations relatives à de graves violations des droits fondamentaux, notamment de possibles crimes de guerre, imputables aux groupes armés d’opposition, dont l’Armée syrienne libre.

L’organisation examine les informations selon lesquelles les groupes armés d’opposition sont responsables d’exécutions sommaires d’agents des forces de sécurité capturés et d’homicides illégaux, d’enlèvements de civils, d’actes de torture et autres mauvais traitements, d’utilisation d’enfants lors des hostilités et d’utilisation inconsidérée et de stockage d’armes.

Dans des situations de conflit armé, toutes les parties, y compris les groupes armés d’opposition, sont juridiquement liées par les règles du droit international humanitaire, dont les graves violations constituent des crimes de guerre.

En exergue :

Nous avons recensé des crimes contre l’humanité en Syrie depuis le début de la répression lancée par le gouvernement en 2011. Alors que les combats entre les forces gouvernementales et les groupes armés d’opposition se sont intensifiés ces derniers mois, de plus en plus d’éléments attestent que des crimes de guerre sont commis, – Ann Harrison.
Si le Conseil de sécurité porte le dossier syrien devant la CPI, les auteurs présumés des plus graves crimes de droit international, quel que soit leur camp, pourraient faire l’objet d’investigations et être poursuivis.

Amnesty International a exhorté les gouvernements des « Amis de la Syrie » à s’acquitter de leur responsabilité partagée d’enquêter et de sanctionner les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité et les autres crimes relevant du droit international commis en Syrie, et à chercher à exercer leur compétence universelle pour ces crimes devant des tribunaux nationaux, dans le cadre de procès équitables et en excluant la peine de mort.

En mettant en place des équipes d’enquête internationale conjointe et des équipes chargées des poursuites, les gouvernements des « Amis de la Syrie » amélioreraient l’efficacité des enquêtes, ainsi que les chances d’arrêter les responsables et de coordonner les poursuites.

Enfin, selon Amnesty International un plan de paix doit exclure toute mesure d’amnistie ou toute disposition analogue pour les crimes relevant du droit international.

Date : 9/7/2012