Syrie: Gooood morning Aleppo! Ici Radio « Brise de Syrie »

Article  •  Publié sur Souria Houria le 26 septembre 2013

"Gooood morning Vietnam!" lance Wael Adel devant son micro. Ce Syrien épris du mythique film américain veut que sa radio "Brise de Syrie" soit un trait d'union entre les habitants d'Alep, qu'ils résident dans les quartiers pro ou anti-régime.

« Gooood morning Vietnam! » lance Wael Adel devant son micro. Ce Syrien épris du mythique filmaméricain veut que sa radio « Brise de Syrie » soit un trait d’union entre les habitants d’Alep, qu’ils résident dans les quartiers pro ou anti-régime.
« Depuis que j’ai vu le film, j’ai toujours voulu répéter cette phrase », plaisante ce jeune homme de 30 ans, dans un studio aux murs insonorisés avec des boîtes d??ufs en carton.

Il prépare ses papiers, avant de commencer à enregistrer: faute de moyens, les journalistes-citoyens d’Alep, ville dévastée par plus d’un an de combats, ne peuvent pas émettre en direct. Ils doivent enregistrer leur programme qui sera diffusé par leurs collègues en Turquie, proche de la frontière syrienne.
« Nous aurions aimé faire du direct, mais c’est impossible car nous n’avons pas d’ingénieur du son, ni les moyens de le faire d’ici », explique Wael, qui a obtenu une licence en philologie arabe de l’université d’Alep, avant de devenir « directeur » de la radio.
Malgré son équipement de base, « Brise de Syrie », née début 2013 et comptant six collaborateurs à Alep et six autres en Turquie, émet 24 heures sur 24 et sept jours sur sept.
Il y a neuf mois, Wael a ressenti la nécessité de créer cette radio.
« A Alep, il n’y avait ni électricité, ni télévision et les gens ne savaient pas ce qui se passait chez eux ou dans le reste du pays », dit-il.
La radio apporte aussi un soutien moral à la population. « Beaucoup de gens écoutent +Brise de Syrie+ pour ne pas se sentir seuls », assure fièrement Wael.
Durant le premier mois, la radio était disponible uniquement via internet mais progressivement, deux antennes ont été installées à Alep et une autre à Raqa (nord).
Avec plus de 26.400 « Like » sur Facebook, la radio s’est fait connaître grâce aux réseaux sociaux.
« A Alep, nous n’étions pas très connus, car les gens ne pouvaient nous écouter à moins d’avoir internet, mais nous avons progressivement accru notre audimat », dit son directeur.
Il explique également avoir peint le logo de la radio à travers la ville pour que les gens le reconnaissent.
« J’ai des amis qui vivent dans la partie contrôlée par le régime et qui nous écoutent tous les jours », s’enorgueillit-il.
« Les chauffeurs de taxis sont les meilleurs auditeurs car ils gardent la radio allumée toute la journée. Quand ils reconnaissent ma voix, je me sens fier de notre travail », ajoute-t-il encore.
Les premiers mois furent difficiles. « A cause des fréquentes coupures d’électricité, on ne pouvait pas envoyer nos reportages en Turquie », affirme Baher, un collaborateur de 22 ans.
« Rire n’est pas facile »
Aujourd’hui, la radio émet trois programmes hebdomadaires: un sur les problèmes de la vie quotidienne dans la ville et un second sur la santé, avec un médecin.
« Comme il n’y a plus de lignes de téléphones à Alep, personne ne peut appeler pour poser des questions, alors on demande à l’avance aux gens dans la rue de poser des questions et on y répond en studio ».
Mais c’est le troisième programme qui remporte le plus de succès, avec deux acteurs qui se moquent des soucis quotidiens à Alep.
« Les gens adorent, car en ces temps de guerre, rire n’est facile », dit Baher.
Conduisant son taxi, Abou Ali cherche la radio sur la fréquence 98.5 FM.
« J’aime beaucoup cette radio car nous pouvons l’écouter en famille », dit-il.
Abou Hassan, un collaborateur de « Brise de Syrie », raconte les difficultés du métier.
« Les gens ont souvent peur de nous parler car ils pensent que s’ils se déplacent dans des quartiers contrôlés par le régime, on pourra reconnaître leur voix et les mettre en prison. Comme si le régime n’avait d’autre chose à faire que d’écouter la radio », soutient cet étudiant en journalisme.
De leur côté, les rebelles de l’ASL « nous ont menacés de prison la semaine passée parce qu’on faisait du micro-trottoir. Ils nous accusaient d’être des espions du régime », dit Abou Hassan.
Malgré tous ces obstacles, Wael ne vit que pour sa radio et ses ambitions sont sans limites. « Un jour, j’aimerais créer une télévision ».

source : http://www.leparisien.fr/flash-actualite-culture/syrie-gooood-morning-aleppo-ici-radio-brise-de-syrie-26-09-2013-3171827.php

date : 26/09/2013