Syrie – Un pays en voie de déliquescence

Article  •  Publié sur Souria Houria le 13 juin 2012

Dessin de Hajo de Reijger, Pays-Bas.

Selon un site d’opposants situé aux Pays-Bas, la fuite des dignitaires du régime, les pertes au sein de l’armée et les crimes commis par certains opposants s’accélèrent.

En Syrie, il se passe certaines choses qui échappent aux observateurs, débordés qu’ils sont par le flot des informations. Ces jours-ci, on voit des centaines de responsables, parfois haut placés, partir en toute discrétion à l’étranger. Ils emmènent avec eux leur famille et emportent ce qu’ils ont pillé au cours de leur carrière au sein du régime. C’est vrai qu’ils ne déclarent pas leur défection et qu’ils ne consomment pas la rupture avec le régime ; ils restent organiquement liés à lui. Toutefois ils vendent leurs biens pour ne garder que leur résidence principale et se font accompagner par leur femme et leurs enfants.Pour en comprendre la raison, il faut savoir que l’exaspération sourde contre le pouvoir ne fait qu’enfler, et ce jusque dans les zones à majorité alaouite [la communauté du président]. Car les campagnes alaouites sont elles aussi frappées d’une hécatombe. Il n’y a presque plus de village qui n’ait eu son cortège de cercueils : certains villages de la région de Masyaf [région alaouite du nord de la Syrie] ont eu à déplorer la mort de plus de cent militaires. On y pense tout bas : “Ce régime nous conduit au bord du gouffre.”

Le drame, c’est que beaucoup de gens se trouvent coincés entre l’enclume impitoyable du régime et le marteau sanglant de l’opposition, opposition qui publie sur Internet de longues listes de gens à abattre et utilise ouvertement les termes “extermination de la communauté alaouite” comme nouvel objectif de la révolution.

Par ailleurs, le nombre moyen de morts parmi les soldats s’élève désormais à plus de 20 par jour, la plupart du temps victimes de guets-apens sur le chemin de leur travail ou près de leur maison, et non pas au cours d’opérations militaires. A la fin du mois de mai, le total aurait atteint, selon des sources bien informées, plus de 3 000 morts et des milliers de blessés, dont beaucoup de handicapés à vie. La bassesse du régime est telle qu’il a donné instruction aux médias de ne mentionner que le quart ou le tiers des victimes quotidiennes. Quant à l’explication donnée, elle est encore plus méprisable : il s’agit de “ne pas affaiblir le moral” des forces régulières.

Le nombre de chars, blindés et autres matériels militaires lourds détruits jusqu’à début juin s’élèverait à plus de quatre cents, dont pas moins de vingt chars d’un modèle récent. Ces pertes, à titre d’exemple, sont plus importantes que celles de la guerre d’octobre contre Israël, en 1973. Certaines zones échappent désormais totalement au contrôle du pouvoir, comme Deir Al-Zor à la frontière avec l’Irak, mais aussi Idlib, ainsi que les environs de Hama et la région au nord d’Alep [nord de la Syrie]. Là-bas, ce sont les bandes “révolutionnaires” qui ont la haute main, condamnant au poteau toute personne suspectée d’être en faveur du régime. Encore tout récemment, une pendaison a été organisée en public à Azaz [nord de la Syrie].

Etant donné que le régime se confond à peu près totalement avec l’Etat depuis l’arrivée au pouvoir du parti Baas, la déliquescence du premier entraîne automatiquement l’effondrement du second. La Syrie est donc engagée sur la voie de la décomposition, la population vivant dans une sorte de guerre civile froide. Rien ne permet d’éviter cette catastrophe, à moins d’espérer un miracle dont seule l’armée pourrait être l’auteur. Il faudrait qu’elle fasse un coup d’Etat contre la clique de Bachar El-Assad et établisse une autorité temporaire sous forme de Conseil militaire. Celui-ci déléguerait le gouvernement à une coalition de toutes les forces démocratiques, à l’exception de celles qui sont à la solde de l’étranger et des islamistes radicaux.

Source : http://www.courrierinternational.com/article/2012/06/07/un-pays-en-voie-de-deliquescence

Source : http://www.syriatruth.org/