Témoignage de Mazen Hammada: barbarie et impunité!

Article  •  Publié sur Souria Houria le 28 avril 2015

azen Hammada, technicien dans l’industrie pétrolière, de Deir-Ezzor, s’est d’abord fait arrêter deux fois, en avril et ensuite en déc 2011, à Deir-Ezzor, parce qu’il participait aux manifestations pacifiques, les filmait et ensuite les mettait en ligne ou les envoyait aux médias. 
La troisième fois, il s’est fait arrêter au souk de Damas, en mars 2012. Il y avait rendez-vous avec une doctoresse de Darayya pour lui remettre du lait pour les enfants des déplacés. Il s’est fait arrêter avec ses deux neveux qui l’accompagnaient et avec la doctoresse. Sa détention a duré un an et sept mois. Il était détenu à l’aéroport militaire d’al-Mazzeh à Damas.

FSD a traduit et publié son témoignage, accordé à la chaine télévisée Al-Ghad Al-Arabi et publié sur Youtube le 22 avril 2015.

Mazen Hammada, interviewé par al-Ghad al-Arabi (source vidéo de l'interview)

 

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L’interrogatoire et la torture

« Ils nous ont mis dans une cellule de 1.40 sur 1.40m. Nous étions entre 10 et 12 personnes dans cette cellule. Nous devions nous asseoir 5 le long d’un mur et 5 le long du mur d’en face, et une ou deux personnes restaient debout. Nous faisions un tournus toutes les deux heures.

Pendant l’interrogatoire j’ai reconnu avoir participé aux manifestations mais l’officier m’a demandé de reconnaître avoir porté des armes et avoir tué… j’ai refusé. Ils m’ont couché parterre.. quatre hommes se sont mis à sauter sur moi avec leurs bottes militaires… mes côtes se sont cassées et je n’arrivais plus à respirer. L’officier m’a reposé la question et ma réponse est restée négative. Alors ils ont installé sur mon pénis une bride que l’on peut serrer… et ils se sont mis à la serrer… là j’ai cédé, pas seulement à cause de la douleur mais aussi de peur que mon pénis ne soit sectionné. J’ai reconnu à tort avoir porté une arme pour stopper le supplice… Ensuite, j’ai été suspendu par les poignets jusqu’à ce que j’accepte de reconnaître avoir fait exploser un check-point… Ils m’ont aussi enfoncé une barre de fer dans l’ anus et j’en ai encore les cicatrices… ces gens sont dénués de toute valeur humaine. »

Bouclier humain en août 2013
« Lorsqu’il y a eu menace d’une frappe américaine possible suite à l’utilisation d’ armes chimiques à large échelle à al-Ghouta, à Damas, ils nous ont transférés dans les hangars d’aviation pour que nous soyons tués sous les bombardements. Nous étions environ 700 détenus par hangar. Nous y sommes restés un mois environ avant de retourner en cellule. »

Les conditions de détention
« Chaque jour il y avait un ou deux morts dans notre cellule, car nous avions pas assez d’air et les conditions de détention n’étaient pas supportable pour les personnes âgées ou malades. Nous étions alors 180 dans une cellule de 11×6 m2. Nous devions nous asseoir et d’autres s’asseyaient sur nos genoux. Parfois le gardien mettait son fusil dans la fente de la porte et il tirait sur le plafond en dessus de nos têtes… la balle restait parfois plantée dans le plafond ou alors elle ricochait et touchait l’un de nous. »

L’hôpital militaire 601
« Suite à mon interrogatoire et à la torture barbare que j’ai subie, j’avais les côtes cassées, je vomissais et j’urinais du sang. J’ai alors été transféré, avec d’autres, à l’hôpital militaire 601 de Damas. Dès notre arrivée à l’hôpital nous avons été accueillis par des coups de bâtons ou de chaussures par les infirmiers et les infirmières. Ensuite nous avons été placés à trois par lit et menottés. La nuit je suis allé aux toilettes, j’ai ouvert la première porte j’y ai trouvé deux cadavres, j’ai ouvert la deuxième, j’y ai trouvé deux cadavres, je suis allé vers le lavabo, il y avait là le corps d’un jeune homme blond d’environ 17 ans… Là, j’ai disjoncté, le gardien me parlait mais je ne pouvais pas répondre.. alors il s’est mis à me tabasser… Il y avait aussi un gardien à l’hôpital qui se donnait le surnom Azraël, l’ange de la mort. Il est arrivé une fois à minuit avec une barre de fer avec des pointes. Il a demandé qui parmi nous avait besoin de médicaments. L’un de nous a répondu par l’affirmative. Alors Azraël s’est approché de lui et lui a dit : « Le tribunal de Dieu t’a condamné à mort » et il s’est mis à le tabasser jusqu’à l’éclatement de sa tête. Il en est mort et il a été ensuite transporté aux toilettes. »

Sadisme
Vers la fin de ma période de détention nous avons dû donner nos empreintes en attendant d’être transférés pour être jugés devant le tribunal. Il y avait un enfant de seize ans avec nous. Le gardien lui a demandé d’où il venait, il a répondu de Darayya (lieu symbole de protestations pacifiques à Damas). Il l’a alors tabassé et ensuite il a amené un poste de soudure et lui a brûlé le visage, qui a littéralement fondu… nous l’avons ramené dans la cellule, nous avons tenté de rafraichir ses brûlures, mais deux jours plus tard il est décédé… Mon cœur s’est brisé pour cet enfant. »

La fuite de Syrie
« Après ma sortie de détention, comme j’étais toujours recherché par le service de renseignement (les différents services ne communiquent pas). Je me suis alors rendu clandestinement à Deir-Ezzor. Ensuite j’ai fui la Syrie vers la Turquie où j’ai pris le bateau vers la Grèce et ensuite un camion pour arriver aux Pays Bas. »
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L’impunité!
Il faut préciser ici que les officiers et les gardiens des centres de détention bénéficient d’une impunité totale… impunité qui incite les personnes dérangées à développer de plus en plus des méthodes barbares pour torturer les détenus…Et c’est la même impunité dont bénéficie Assad et ses semblables qui rend ces dictatures de plus en plus barbares…

Non à l’impunité!… Seule la justice peut acheminer la Syrie vers la paix.

 

source : https://femmesdemoc.wordpress.com/2015/04/26/temoignage-de-mazen-hammada-barbarie-et-impunite/

date : 26/04/2015