Les Syriens pleurent Gilles Jacquier « martyr de la libre expression » – par Hala Kodmani

Article  •  Publié sur Souria Houria le 13 janvier 2012

Sur leurs profils Facebook, nombre de Syriens ont affiché le portrait du journaliste de France Télévisions tué mercredi en ce « Jeudi de Gilles Jacquier » – « martyr de la libre expression » – décrété par la page de la Révolution syrienne. Le choc et l’émotion sont partagés par les Syriens qui ont pleuré des milliers de morts.

« C’est le premier martyr non syrien de la presse libre » a écrit l’opposante syrienne Suheir Atassi en ajoutant « que le sang des Syriens s’est mêlé aujourd’hui à celui des témoins de notre révolution pour la liberté ». Et de rappeler que huit Syriens ont été tués avec Gilles Jacquier le même jour à Homs.

Pas de visas pour la Syrie

Plusieurs relèvent l’ironie :

« Les journalistes, entrés clandestinement à Homs ou ailleurs, sous la protection des révolutionnaires ou des déserteurs de l’armée sont repartis indemnes et ont pu diffuser leurs reportages, alors que Gilles Jacquier, qui est arrivé le plus légalement avec un groupe de journalistes autorisés par le régime, a été tué ! »

Gilles était si heureux d’avoir obtenu ce visa pour la Syrie, même s’il savait qu’il serait très « encadré » au cours de ce voyage de presse organisé par une religieuse libanaise, Sœur Marie-Agnès, grande avocate du régime de Bachar El-Assad. Il voulait tout faire, couvrir toutes les réalités et les différents aspects de ce conflit syrien, privé depuis le début d’un regard journalistique professionnel.

« Journalistes, dégagez ! »

Un peu forcé par l’une des dispositions du plan de la Ligue arabe qui prévoit « l’accès libre de tous les médias arabes et étrangers », le régime syrien a laissé venir quelques reporters, non sans les surveiller de très près. Mais il n’a apparemment pas su ou voulu les protéger.

Un journaliste syrien rapporte le texte du SMS angoissant qu’il a reçu quelques heures après la mort de Gilles Jacquier :

« Alors braves journalistes… Vous avez vu ce qui est arrivé à votre confrère français Jacquier… Vous voyez ce qui arrive à celui qui désobéit. Les chéris, rentrez donc à la maison, on ne veut pas vous voir. Dégagez ! »

Les journalistes vont-ils désormais ne plus même chercher à aller en Syrie après ce drame ? C’est mal les connaître que de croire qu’ils vont se désintéresser de ce terrain d’où l’on veut les chasser.

source: http://blogs.rue89.com/neo-arabia/2012/01/12/les-syriens-pleurent-gilles-jacquier-martyr-de-la-libre-expression-226235