A Damas, le soutien zélé de la génération Bachar au régime
Du blog de Hala Kodmani – Neo Arabia sur Rue89 http://www.rue89.com/neo-arabia/2011/05/05/en-syrie-le-soutien-zele-de-la-generation-bachar-au-regime-202589
Jeunes, beaux, éduqués, aisés, de bonne famille, ils pestent aujourd’hui contre une révolte qui « déstabilise » le pays et croient encore que le régime actuel est le meilleur possible pour la Syrie.
« Notre peuple est trop sous-développé pour la démocratie ! Il a besoin de vivre et non d’être libre, » résume cyniquement Ayman, un beau quadragénaire aux yeux bleus, en polo Lacoste et Jeans Armani. Installé sur une terrasse de café des beaux quartiers de la capitale syrienne, ce damascène pure souche qui tient une boutique de prêt à porter de marques italiennes importées, enrage contre « ces gens sortis par mimétisme pour les révolutions tunisienne et égyptienne, réclamer la liberté sans savoir de quoi il s’agit !»
La thèse du complot
Comme lui, toute une petite élite occidentalisée, ayant fait des études à l’étranger puis profité de l’ouverture économique de ces dernières années en Syrie, continue de défendre le régime de Bachar EL-Assad jusqu’à soutenir sa répression féroce contre la population.
Ces partisans zélés ont parfaitement intégré la thèse du complot soutenue par le pouvoir et se font le relais de tous ses arguments, y compris les plus aberrants. «Le cousin de ma belle sœur qui habite à Homs (quatrième ville du pays) a vu de ses propres yeux les bandes de salafistes armés surgir dans la ville et tirer sur les forces de sécurité avec leurs mitraillettes », raconte Naji, ingénieur chrétien de Damas, « il n’y a rien d’étonnant avec le Liban à côté ! ». L’intox passe toujours par les rumeurs et à travers les yeux de témoins indirects. Inutile de lui opposer que ce sont peut-être là des miliciens lâchés par le régime lui-même, Naji est persuadé que le pays est attaqué par des « mains étrangères qui en veulent à sa position nationaliste et son soutien à la résistance du Hezbollah et du Hamas ».
Génération Bachar
Sans faire preuve tous du même aveuglement, certains de ces fils de la haute bourgeoisie syrienne ont l’air sincèrement inquiets de voir leur pays basculer vers l’inconnu. Ils continuent de faire confiance à ce jeune président « prometteur » (au bout de onze ans au pouvoir). Ils veulent croire encore à sa volonté de réforme, contrariée par son entourage sécuritaire. Avouant parfois leur déception « après le discours catastrophique devant l’Assemblée du peuple » au début des troubles, ils font remarquer la marche arrière, la levée de l’Etat d’urgence, le changement de gouvernement, les mesures anti-corruption annoncés… et accusent les protestataires d’une impatience suspecte.
« Le pays court des dangers immenses de confrontation communautaire, » affirme Ayman, relayant encore l’intox officielle sur « la sédition » provoquée par l’extérieur. « Et puis, on savait bien que ce régime ne reculerait devant rien pour conserver le pouvoir. On connait la brutalité dont il est capable et il tient parfaitement l’armée et les forces de sécurité. Ce n’est donc pas la peine d’essayer de s’y opposer ». La peur serait donc aussi à l’origine du soutien d’une génération au régime tyrannique ? « Plutôt mille fois « lâche » que « Paix à son âme ! », selon un proverbe syrien, que répète Ayman.