Du sang et des cendres pour peindre le conflit syrien. Tammam Azzam. Par Lynne Nahhas
Une carte de la Syrie dégoulinant de sang, une autre se désintégrant en cendres: le conflit dans son pays a inspiré à l’artiste Tammam Azzam, qui expose à Dubaï, une série de toiles poignantes.
« J’ai utilisé la carte comme un symbole », explique-t-il, montrant un immense montage, représentant la carte de son pays peinte en rouge et dégoulinant de sang, qui a été reprise par de nombreux activistes sur internet.
« La carte de la Syrie ne représentait rien pour moi jusqu’au début du conflit. Soudain, j’ai redécouvert mon pays », ajoute le jeune homme aux yeux sombres, âgé de 32 ans, qui travaille sur un support numérique avant d’effectuer des tirages sur papier de ses oeuvres.
Une autre oeuvre montre une carte de la Syrie carbonisée, tombant en pièces, alors qu’une troisième surimpose sur la carte, toujours peinte en rouge, le logo des Nations unies transpercé d’une balle.
L’artiste affirme avoir voulu critiquer l’inaction de la communauté internationale face au sanglant conflit en Syrie, où plus de 41.000 personnes ont été tuées depuis le début de la révolte en mars 2011, selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH).
« Toute mon oeuvre est inspirée par la révolte », affirme Tammam Azzam, selon lequel le soulèvement en Syrie « est le plus sanglant du +printemps arabe+ ». D’ailleurs, une de ces oeuvres montre un papillon rouge, en train de saigner.
Une partie de l’exposition, intitulée « le Musée syrien », intègre des photos des destructions dans le pays à l’intérieur de tableaux célèbres, comme « La Joconde » de Léonard de Vinci, « Le Cri » d’Edvard Munch ou « Les fusillades du 3 mai » de Francisco de Goya.
« Comment ces pays civilisés peuvent-ils célébrer un tableau de Goya qui représente un massacre d’un jour dans l’histoire de l’Espagne (l’exécution de combattants espagnols par les soldats français), et oublier que nous avons chaque jour un 3 mai en Syrie », se demande l’artiste.
D’autres oeuvres reflètent la nostalgie de l’artiste, originaire de la région druze de Soueida, pour son pays qu’il a fui il y a un an. Ainsi, une carte de la Syrie, peinte en noir cette fois, est étendue sur un fil comme du linge.
« Le linge représente les souvenirs que l’on laisse derrière nous », affirme le jeune homme.
Au fond d’un aquarium gît une petite voiture chargée de débris. « Toutes les parties en Syrie se noieront ensemble s’il n’y a pas d’issue », affirme Tamamam Azzam.
Même s’il défend le recours aux armes par les Syriens pour se défendre face à « une répression d’une sauvagerie inégalée » selon lui, il affirme ne pas être capable lui-même de porter les armes.
« J’ai fui la Syrie parce que je ne voulais pas être appelé comme réserviste dans l’armée. Je ne peux pas porter un fusil », affirme-t-il.