La Syrie noyée sous des tonnes d’armes
Les Russes équipent à mort l’armée de Bachar, et les insurgés sont soutenus par les états arabes sunnites.
LA demande de l’Elysée, le Quai d’Orsay vient d’inviter les militaires syriens à déserter. Sans désapprouver cette démarche » fort inhabituelle « , dit-il, un diplomate de haut rang n’en espère pas, pour autant, une vague de fuites vers la Turquie (60, la semaine dernière) et le Liban, ou un renforcement immédiat de l’insurrection. « C’est un effet d‘annonce, affirme-t-il, destiné aux médias et à la « séquence émotion » des journaux télévisés. Les officiers et les soldats de Bachar n’attendent pas un appel de Fabius ou de Hollande pour oser franchir le pas et mettre leur famille en danger. » Voilà qui remplace utilement, si l’on ose dire, de bonnes livraisons d’armes aux insurgés. Seule initiative en ce domaine: Fabius a fait savoir que la France allait leur remettre gracieusement des moyens de transmission.
Depuis plusieurs mois, les unités de l’Armée syrienne libre (ASL) reçoivent le renfort d’islamistes radicales étrangers et une aide internationale importante. Cela n’est plus un secret, sauf en ce qui concerne la variété des matériels. A savoir kalachnikovs, grenades propulsées par roquette, missiles antichars, tonnes de munitions et d’explosifs, moyens de communication, missiles sol-air pour abattre les hélicoptères et équipements sanitaires. Membres de cette petite Internationale des fournisseurs : l’Arabie saoudite, l’inévitable Qatar, les Emirats arabes unis et les Etats-Unis. Mention spéciale à la CIA, qui, grâce aux satellites américains, livre aux insurgés des informations sur les déplacements des forces de Bachar. A Istanbul, un immeuble prêté en secret par les Turcs permet à l’ASL de coordonner l’insurrection. Mieux, le riche émirat du Qatar règle les soldes des combattants.
Ministre russe des affaires étrangères Sergueï Lavrov ne cesse d’accusé les occidentaux et leurs alliés sunnites d’aliment.er cette guerre civile. Alors que Moscou il le jure, respecte l’embargo sur les livraisons d’armes qui frappe la Syrie, en ne fournissant à son ami Bachar que des armes « défensives » et pas « agressives » pour un sou.
Généreux Pouline
Faudrait-il, dès lors, s’interroger sur l’origine mystérieuse des tonnes d’obus, de munitions, de roquettes et de missiles balancés depuis plus de quinze mois sur les villes insurgées et les manifestations pacifiques, le vendredi, au sortir des mosquées?
Au début de l’année, Obama a une nouvelle fois demandé à Poutine de se montrer conciliant et de réduire ses livraisons. Peine perdue, celui-ci a continué de satisfaire la boulimie de Bachar. Et des centaines d’instructeurs, de techniciens ou de formateurs russes conseillent les unités syriennes équipées des excellents matériels fournis par Moscou, et révisés à Moscou, comme ces hélicoptères d’attaque dont les turbines de propulsion laissaient récemment à désirer.
Au cas où, sans l’aval du Conseil de sécurité de l’ONU, l’armée syrienne devrait affronter une intervention occidentale, elle ne manque pas de répondant. Merci, Poutine. Inventaire partiel: missiles antiaériens Buk-M2, missiles antinavires Bastion (250 kilomètres de portée), radars Pantsyr51 accouplés à des canons ou à des batteries antiaériennes, modernes «orgues de Staline « , 4 950 chars, des tonnes de mines, et on en oublie. L’équipe Bachar est vraiment très blindée.
Claude Angeli
« Le Canard enchaîné» -mercredi 27 juin 2012 -3