Le journaliste américain Michael WEISS explique les connexions de Bachar al-Assad avec Daesh lors d’une conférence organisée par Carnegie Council for Ethics in International Affairs (document vidéo – 16.10.2015) – traduit de l’anglais par Marcel Charbonnier
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Durant toute l’histoire de la guerre en Irak, qui est le type qui a financé, dirigé, noyauté, parrainé les djihadistes qui sont entrée en Irak – bien davantage que n’importe qui d’autre dans tout le Moyen-Orient ?
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De qui il s’agit, je vais vous le dire : c’est de Bachar al-Assad ! Ce type tirait les ficelles d’Al-Qaïda en Irak depuis 2009. De fait, voilà ce qu’il se passait : si vous étiez djihadiste en Tunisie, en Arabie Saoudite ou au Pakistan, il vous suffisait de prendre l’avion, de débarquer à l’aéroport international de Damas et, là, vous vous trouviez devant un terminus d’autobus tout prêts à vous emmener dans l’est de la Syrie où vous étiez hébergé par un superviseur d’Al-Qaïda en Irak travaillant main dans la main avec les services d’Assad pour assurer leur couverture (ou avec d’autres services de renseignement), après quoi vous étiez envoyé de l’autre côté de la frontière (en Irak, donc), où vous pouviez prendre pour cible des Américains, des Irakiens, ou qui bon vous semblait.
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En réalité, ces autobus, davantage dans le centre de Damas, étaient stationnés carrément dans la même rue que l’ambassade des États-Unis… Donc, ça, c’est ce qui se passait – au vu et au su du gouvernement américain…
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Les officiels syriens nous trahissaient dans les grandes largeurs et, pendant ce temps-là, l’ambassadeur américain en Syrie, Ryan Crocker, exhortait Assad : « Je vous en conjure : fermez votre frontière, mettez fin à vos relations avec les djihadistes (en Irak) ! ».
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En 2009, un ancien responsable des services de renseignement irakiens [mais qui n’avait pas ‘mal tourné’] a rapporté qu’il avait un correspondant fiable qui s’était mis au vert à Zabadani, une ville (de montagne) située au nord de Damas – un espion –, et que celui-ci avait participé à une réunion avec des représentants d’Al-Qaïda en Irak, certains des meilleurs agents du parti (Baath) de Saddam Hussein et des responsables des services de sécurité syriens pour préparer des attaques terroristes non seulement contre des Américains, mais aussi contre les institutions de l’État irakien.
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Donc (comme je l’ai déjà mentionné) : le ministère de la Santé, le ministère des Finances et d’autres institutions furent pulvérisés au cours des semaines qui allaient suivre lors de spectaculaires attaques terroristes réalisées au moyen de bombes artisanales qui créèrent d’énormes cratères dans le sol.
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C’est là quelque chose dont nous devons nous souvenir. En effet, dès le début des manifestations en Syrie, en 2011, dès le tout premier jour, le mantra d’Assad a consisté à rabâcher : « Je ne réprime pas des manifestants ni des démocrates : je me bats contre Al-Qaïda – cette même Qaïda qui est parrainée par les Etats-Unis, l’Arabie Saoudite et Israël » (rien que cela, autant dire la coalition des gens de bonne volonté, n’est-ce pas ?).
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Le problème (pour lui), c’était de savoir comment se mettre les médias (mondiaux) de son côté, alors qu’il massacrait des enfants : de hommes des services de sécurité du régime ont visé dans les yeux y compris des fillettes ayant guère plus d’une dizaine d’années. Comment aurait-il pu avoir les médias internationaux de son côté dès lors que dans sa propre armée, non pas au niveau des officiers (principalement des alaouites, car il n’y a pratiquement que des alaouites à ce niveau hiérarchique supérieur, les alaouites ayant bénéficié de promotions spéciales), mais au niveau des hommes de l’infanterie, de ceux qui se coltinent les armes et le paquetage, ceux qui sont envoyés se battre réellement sur le terrain, on envoyait ces hommes dans certaines régions où, leur disait-on, ils allaient « se battre contre des terroristes ». Sauf que quand ils virent les « ennemis » sur lesquels ils étaient censés tirer, ils se rendirent compte immédiatement que ça n’était en rien des « terroristes ».
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En face d’eux, ils virent des civils (hommes, femmes, enfants) en train de manifester dans les rues avec des banderoles, des gens qui criaient des slogans comme « Le peuple veut renverser le régime ». Ces militaires refusèrent donc de tirer contre ces gens. Il y eut quelques minutes d’une énorme tension, puis certains hommes dirent à leurs supérieurs : « ça n’est pas sur ces manifestants pacifiques, que nous allons tirer : c’est… sur vous ! »
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Les premiers affrontements armés et les premières défections se produisirent dans la province d’Idlib en 2011, où de jeunes officiers refusèrent de tirer sur les manifestants.
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Par conséquent, Assad était en train de perdre la guerre des idées. Qu’allait-il donc bien pouvoir faire ?
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En 2012, il décrète une amnistie générale pour ceux dont il prétend qu’il s’agit de « détenus politiques ». En fait, beaucoup des djihadistes qu’il avait lui-même envoyés en Irak et qui avaient été arrêtés à leur retour en Syrie furent élargis à cette occasion. Les hommes des trois principales brigades islamistes (dont les dirigeants avaient été formés dans la prison de Sayednaya, dans le département de Damas), ou d’autres unités rebelles sur le terrain, ai-je appris depuis peu, ont été libérés par Bachar al-Assad en mai 2011.
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Pourquoi a-t-il fait cela ? Eh bien, c’est tout simple : il est inutile d’être un spécialiste du Moyen-Orient pour le comprendre. Assad savait très bien que tant que cette campagne, cette guerre d’usure (contre son propre peuple) se poursuivrait, la répression extrêmement brutale de l’État contre les protestataires ne pourrait qu’amener ceux-ci à se radicaliser et que ces civils se tourneraient vers les types portant de longues barbes, qui ne leur promettaient ni le Paradis sur Terre ni des vierges dans l’au-delà pour les hommes tués au combat, se contentant de leur dire : « Untel est venu et il a violé votre fille », ou « Untel a fait jeter votre fils en prison après avoir fait brancher des électrodes à ses testicules… : ceux-là, nous allons les faire sauter ».
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À coup sûr, les gens allaient dire « Allons-y ! ». Vous voyez ? Nous pensons que Daesh (l’État islamique) est l’organisation la plus barbare et la plus violente de tout le Moyen-Orient. Permettez-moi de vous détromper : tout ce que vous avez pu voir, tout ce que vous avez pu lire dans la presse au sujet de ce que cette organisation a commis, Assad l’avait déjà fait – le plus souvent en pire. Brûler vifs des gens ? Les miliciens d’Assad, les shabbîha, des mercenaires d’Assad qui se sont rendus responsables des massacres les plus atroces, ont enfermé des familles entières chez elles, puis ils ont mis le feu à leurs maisons : des familles entières ont péri brûlées vives.
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Simplement, vous n’avez jamais entendu la chaîne CNN parler de ces atrocités…