Les civils syriens cherchent la protection de l’Armée libre – Par Edith Bouvier

Article  •  Publié sur Souria Houria le 21 décembre 2011

Les réfugiés affluent vers la région de Djebel al-Zawiya, la seule du pays qui soit contrôlée par les déserteurs de l’armée de Bachar el-Assad.

En neuf mois, les affrontements en Syrie auraient fait plus de 5000 morts, selon l’ONU. À Djebel al-Zawiya, seule zone sous contrôle de l’Armée syrienne libre (ASL), de nombreux Syriens viennent se retrouver et rêver à un peu de paix. Dans cette région, plus de 5000 soldats de l’ASL veillent à leur protection, même si aux portes de ce territoire les combats restent quotidiens.

Fatma a quitté son village, proche de Homs, avec ses six petits-enfants après la destruction de sa maison par l’armée du régime. «Mon fils avait rejoint les rangs de l’Armée syrienne libre. Pour se venger, ils ont brûlé notre habitation et ils les ont tués, lui et sa femme. Alors je me suis enfuie avec leurs enfants, j’ai réussi à venir jusqu’ici. Je ne savais plus quoi faire.»

La vieille femme a trouvé refuge dans une maison abandonnée. Les anciens habitants sont partis en avril pour rejoindre la Turquie et les camps de réfugiés de la région de Hatay. Un des officiers de l’Armée libre les a installés là et leur a fourni le minimum vital, quelques couvertures, des casseroles et des tapis.

Partout dans le pays, les cours ont cessé

Jour après jour, les habitants s’entraident. Ceux qui ont de la famille à l’étranger reçoivent d’elle un appui financier, ils achètent du fioul et partagent avec leurs voisins. «On est obligés d’être solidaires, aucun pays étranger ne veut nous soutenir. La Ligue arabe se fâche mais ne fait rien concrètement pour nous sauver», explique Ahmad, un des leaders de l’Armée syrienne libre à Djebel al-Zawiya.

Derrière lui, les six enfants restent immo­biles, autour du poêle à pétrole, transis de froid et encore de peur. Ils ne sont pas allés à l’école depuis le début des affrontements. D’ailleurs, presque partout dans le pays, les cours ont cessé. Difficile d’exiger la présence des écoliers quand la moindre sortie est devenue aussi risquée. Ahmad leur distribue quelques biscuits.

«Et pendant ce temps, le Conseil national syrien continue de négocier avec le régime. Ils pensent peut-être parvenir à lui faire entendre raison. Nous, c’est fini, on ne reviendra plus en arrière, on ne peut plus transiger, nos familles ont trop souffert pour cela», explique encore cet homme dont les cheveux bruns, ébouriffés, virent au blanc par endroits.

Ahmad a quitté sa maison, sa famille, ses enfants, il y a six mois. Lorsqu’il a rejoint l’Armée libre, les soldats du régime s’en sont pris aux siens. Il a fallu les cacher, puis disparaître, s’éloigner pour ne pas les mettre en danger. «Mon dernier fils est né en juillet dernier, je n’ai toujours pas pu le voir. Regarde, c’est lui sur le fond d’écran de mon téléphone. Je me bats, je résiste pour lui.»

«Les milices rôdaient comme des chiens»

Dans le village d’à côté, à Jousef, trois familles cohabitent dans une maison. Abderrahman est un des pères de famille, il vit là avec ses cinq enfants. «On n’a pas le choix. Mon frère a été tué par l’armée lors d’une manifestation antirégime  ; le lendemain, les milices chabiha rôdaient autour de nos maisons, comme des chiens. Je savais qu’ils ne tarderaient pas à tous nous massacrer. On a pris ce qu’on avait sur nous et on est partis. De nuit. Pour venir ici. Je savais que les soldats de l’Armée syrienne libre nous aideraient, ce sont les seuls sur qui on puisse compter en ce moment. Mais c’est très dur, l’hiver commence à peine et déjà nous n’avons pas de quoi nous chauffer tous les jours.» Une famille voisine leur apporte quelques sacs de pain et du fromage.

Depuis juillet, la zone de Djebel al-Zawiya n’est presque plus approvisionnée. Seuls parviennent encore à entrer quelques camions de farine pour la fabrication du pain. Heureusement, la plupart des habitants sont fermiers et survivent grâce à leur production. Mais cela ne suffit pas et, régulièrement, des groupes de combattants du bataillon des martyrs de Djebel al-Zawiya sont contraints d’aller jusqu’à Idlib pour se ravitailler. Avant de partir, les hommes font leur prière et se préparent au pire. «La route est dangereuse, on est obligés de passer par la forêt pour éviter les contrôles de l’armée du régime. On remplit des sacs de vêtements et de nourriture et on espère revenir en vie», raconte encore Ahmed. À ses côtés, Yazid confie emprunter cette route très régulièrement, caché, pour aller voir sa famille. Il refera encore le voyage ce soir, si un barrage de l’armée régulière ne l’en empêche pas.

source: http://www.lefigaro.fr/international/2011/12/20/01003-20111220ARTFIG00583-les-civils-syriens-cherchent-la-protection-de-l-armee-libre.php