Lettre du Conseil local de Daraya au Président de la République
Daraya, le 14 juillet 2016
Monsieur le Président de la République
Au moment où vous célébrez la prise de la Bastille, symbole de la victoire contre le despotisme, nous, habitants de Daraya, qui luttons aujourd’hui pour gagner notre liberté, vous écrivons pour vous alerter de la menace qui pèse sur notre ville.
Plus de 8.000 habitants vivent assiégés depuis 2012, aux portes de Damas, dans des conditions extrêmement difficiles. L’électricité, l’eau, les communications y sont totalement coupées. Cette situation s’est brutalement détériorée avec l’intensification des bombardements du régime ces dernières semaines en flagrante violation de l’accord de cessation des hostilités conclu à Vienne en décembre 2015.
Le “corridor humanitaire” constitué par les forces révolutionnaires entre Daraya et la banlieue contiguë de Moadamiye a été détruit. Il en est de même des terrains agricoles de la ville, privant la population de ses dernières ressources. Les habitants qui y avaient trouvé refuge ont été contraints de se retrancher dans les immeubles d’habitation en ruines du centre de la ville. En 4 ans, plus de 8.000 barils explosifs ont été largués sur la ville.
Nous craignons que les dernières avancées des forces de Bachar al-Assad et de leurs alliés ne soient le prélude à un assaut majeur qui verrait le massacre des derniers habitants de Daraya et la destruction totale du berceau du pacifisme syrien. Daraya, qui a résisté au régime et aux extrémistes de Daech, risque de subir un nouveau massacre, similaire à celui d’août 2012. En deux jours, plus de 641 civils avaient été tués par les forces loyalistes.
Ce qui se passe aujourd’hui est en réalité le résultat d’une stratégie de reconquête de Bachar al-Assad, mise en œuvre avec l’appui logistique de Moscou. Les combats et les bombardements ne se sont arrêtés que pendant deux mois au moment de l’application du cessez- le-feu, le 27 février 2016.
Il est à noter qu’en dépit des violations répétées de la trêve par le régime, les forces révolutionnaires ont respecté le cessez-le-feu. Elles se sont toujours prononcées en faveur d’une solution politique à l’instar des responsables civils de Daraya dont elles sont sous le contrôle. De leur côté, les forces du régime ont totalement mis fin à la trêve au mois de mai. Elles progressent désormais vers le centre où sont piégés les derniers habitants.
Monsieur le Président, pour que Daraya « la pacifique » ne devienne pas un nouveau Guernica syrien, les pays de la Task force sur le cessez-le-feu doivent prendre leurs responsabilités. Nous demandons une intervention urgente pour contraindre le régime à appliquer la résolution 2254 du Conseil de Sécurité et l’accord de Vienne de décembre 2015. En plus d’un cessez-le-feu, nous demandons l’établissement d’un corridor humanitaire, l’évacuation des victimes et leur protection et enfin la levée du blocus.
La France, qui a toujours été au côté du peuple syrien, doit user de son influence pour empêcher un nouveau massacre à Daraya, dont elle porterait la responsabilité au même titre que tous les acteurs qui ont parrainé l’accord sur la trêve. En dépit d’une situation humaine et militaire dramatique, la ville de Daraya continuera à résister et à lutter en faveur d’une solution politique et pacifique, comme elle le fait depuis 4 ans. Mais aujourd’hui, seule une intervention de la communauté internationale, des forces politiques et révolutionnaires, permettra d’empêcher l’annihilation totale de Daraya et de ses habitants.
Vive la Révolution, la dignité et la liberté.
Le Conseil local de Daraya – représentants élus des habitants de Daraya