Maram al-Masri « Elle va nue la liberté »
Légendes de gauche à droite : 1/ Portrait de Maram al-Masri, © Philippe Barnoud. 2/ Couverture : Elle va nue la liberté de Maram al-Masri. |
Maram al-Masri
Elle va nue la liberté Editions Bruno Doucey, collection L’autre langue, 2013
Dans le milieu du XXème siècle, un philosophe avait cru pouvoir affirmer qu’après Auschwitz aucune écriture poétique ne serait désormais possible. Sans doute estimait-il que les agissements des tortionnaires, en ce qu’ils avaient atteint les sommets de la barbarie, ne pourraient que susciter le silence. Bien plus, la découverte de ces horreurs aurait provoqué un tel désenchantement du monde que toute expression poétique en serait devenue impraticable. Ce qui est certain, c’est qu’elle n’a pas empêché parmi les nouvelles générations, le surgissement d’autres bourreaux aussi implacables, armés de sanglantes idéologies pour tenter de justifier le massacres des innocents. Des poètes, même s’ils éprouvent souvent le sentiment douloureux de clamer dans le désert, se dressent, parfois au péril de leur vie, pour crier leur révolte contre les assassins et leur commisération envers les victimes. Et la poésie continue d’aller « sur ses pieds de roseau ». Ainsi Maram al-Marsi, poète franco-syrienne en exil à Paris, dénonce-t-elle dans de courts poèmes bouleversants de justesse et de sincérité, la sanglante répression qui décime hommes, femmes et enfants de son pays, avec tous ces corps jour après jour suppliciés, « qu’une mère orpheline couvre de baisers ». Ses accents de colère et de compassion résonnent dans nos mémoires comme ceux de nos poètes résistants du temps des « années noires ». L’émotion nous étreint lorsque nous écoutons l’auteure elle-même dire ses textes dans une langue arabe aux inflexions souples et sensibles. Lorsqu’un peuple a pu donner naissance à un poète inspiré d’une telle ferveur, on est en droit de souhaiter de tout cœur pour ce pays qu’il voie bientôt s’avancer, sur le chemin de Damas, la LIBERTĖ dans son plus simple appareil, sans risquer la frappe insensée d’un quelconque snipper. Jean-Claude Xuereb |