Paroles de Syriens, pour le 3ème anniversaire de la révolution en Syrie (10)

Article  •  Publié sur Souria Houria le 17 avril 2014

Pour marquer l’entrée de la révolution syrienne dans sa quatrième année
des opposants politiques et des activistes
ont accepté de résumer en quelques lignes
le message qu’ils souhaitaient adresser
à la population française.

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Abdel-Raouf DARWICH
citoyen syrien
et président du Collectif du 15 mars pour la Démocratie en Syrie

Abdel-Raouf DarwichAbdel-Raouf Darwich

 

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Nul ne peut assister silencieux à l’extermination d’un peuple !

Le peuple français a naguère connu l’amertume de l’occupation nazie. Il a perdu en combattant cette occupation des milliers d’hommes et de femmes, tombés en martyrs de la liberté et de la dignité parce qu’ils voulaient vivre dans un Etat démocratique garantissant à tous les citoyens l’égalité des droits et des devoirs. Or cette occupation est restée brève, si on la compare à ce que supporte le peuple syrien qui subit depuis des décennies l’occupation du régime des Al-Assad, père et fils.

Pour rester en place, ce régime s’est appuyé sur des appareils sécuritaires qu’il a chargés de réprimer les libertés. Ils ont donc procédé à des arrestations arbitraires, maltraité les citoyens, jeté des hommes et des femmes en prison par dizaines de milliers et les ont retenus dans les geôles des moukhabarat, sans formuler contre eux d’accusation et sans permettre à leurs proches de savoir s’ils étaient morts ou vivants. Il s’est principalement reposé pour cela sur des membres de la communauté dont il était issu, auxquels il a confié les fonctions les plus sensibles au sein de l’Etat et dans l’Armée.

Face à une situation aussi amère, et confronté à une corruption gangrenant tous les rouages de l’Etat, le peuple syrien s’est soulevé en mars 2011. Aujourd’hui, trois ans plus tard, il continue de réclamer les libertés auxquelles il a droit, la séparation des pouvoirs, l’établissement d’un Etat civil démocratique, la fin de la domination du parti dirigeant et de l’état policier… A ces revendications légitimes, le régime a répondu de manière brutale : il a ouvert le feu à balles réelles sur les manifestants désarmés, il a utilisé contre les civils toutes les armes létales à sa disposition, y compris les armes chimiques, il a détruit un grand nombre de villes et de villages à travers le pays, il a tué plus de 200 000 personnes et provoqué l’exode de millions de Syriens en direction d’Etats voisins. Des dizaines de milliers de détenus ont été soumis en prison à toutes formes de tortures. Plus de 20 000 d’entre eux en sont morts.

Ce régime n’aurait pu se comporter ainsi sans le soutien inconditionnel de Vladimir Poutine, l’appui du régime des Mollahs de Téhéran, et la coopération de plusieurs milices : le Hizbollah libanais, le groupe Abou al-Fadl al-Abbas irakien, la Garde révolutionnaire iranienne…

Le peuple syrien a malheureusement été laissé seul face à l’appareil criminel du régime. Il n’a pu s’appuyer que sur ses modestes moyens, faute de voir se concrétiser les promesses de soutien matériel et militaire faites aux forces de l’opposition par les Etats « Amis du peuple syrien ».

Comme on le sait, le peuple syrien est composé d’un grand nombre de communautés religieuses et d’ethnies. Il n’a pas connu dans son histoire d’atteintes aux droits des minorités. C’est le régime qui, fonctionnant selon une logique sectaire, a joué sur la corde du confessionnalisme. C’est lui qui a agité la menace du confessionnalisme. N’est-ce pas Bouthayna Cha’aban, conseillère politique et médiatique de Bachar al-Assad, qui a la première parlé de « guerre confessionnelle » ?

La révolution du peuple syrien est une révolution pour la liberté et la démocratie. Elle aspire à l’édification d’un Etat démocratique, dans lequel tous les citoyens auront les mêmes droits et les mêmes devoirs. Les valeurs et les principes auxquels il adhère ne peuvent laisser  le peuple français indifférent. Il ne peut rester les bras croisés devant les massacres et les crimes contre l’humanité que le régime commet quotidiennement contre son peuple.

Dans les circonstances plus que compliquées dans lesquelles il se débat, le peuple syrien espère que le soutien du peuple français, à tous les niveaux, lui permettra d’atteindre ses objectifs de liberté et de démocratie. Ils passent par le renversement du régime en place, brutal et criminel.

Abdel-Raouf Darwich

source : http://syrie.blog.lemonde.fr/2014/04/11/paroles-de-syriens-pour-le-3eme-anniversaire-de-la-revolution-en-syrie-10/

date : 11/04/2014