Rassemblement à Paris contre la répression en Syrie – Par Antoine Galindo
18 Avril 2012
Rassemblement contre la répression en Syrie mardi 17 avril sur l’esplanade du Trocadéro, à Paris. Au premier plan, l’actrice Fadwa Suleiman, exilée en France.
Une chaîne humaine et une longue banderole blanche entourent l’esplanade du Trocadéro à Paris, ce mardi 17 avril en début de soirée. La « vague blanche » qui s’y tient est organisée par la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme, en coopération avec des associations de soutien aux victimes de la répression syrienne. Elle veut être le point de départ d’un mouvement pacifiste et avant tout symbolique, voué à se développer à travers le monde.
Plusieurs personnalités du monde artistique et intellectuel ont fait le déplacement sur le parvis des droits de l’Homme. « Nous voulons sensibiliser le public et le peuple français, explique Darina Al-Joundi, une comédienne libanaise. Parce que beaucoup plus que la position officielle de la France, l’important pour les Syriens, c’est qu’ils voient le peuple français descendre dans la rue et afficher sa solidarité. »
Les manifestants portent des panneaux blancs couverts de photos de sympathisants célèbres et tiennent des pancartes « STOP » entre leurs mains. « Stop au massacre, stop à la répression, stop à la guerre du régime syrien contre son peuple qui ne fait que réclamer sa liberté », s’insurge Mustapha, un étudiant arrivé en France il y a un an et demi. Lui aussi veut croire au symbole de « la vague blanche ». « C’est réconfortant de voir qu’en France, il y a des gens qui nous respectent. »
« ON A PEUR QUE LE MONDE S’HABITUE À CES MASSACRES »
Au centre de l’esplanade, un étendard syrien recouvert de roses blanches est tenu à bout de bras par les manifestants, qui scandent toutes sortes de slogans à l’encontre de Bachar Al-Assad. « Nous luttons contre cette boucherie, contre le tapis de bombes qui s’abat sur Homs », s’indigne Jacques Higelin. Le chanteur est lui aussi venu soutenir le rassemblement. « Si les Etats ne peuvent rien contre cette dégueulasserie, nous devons nous regrouper et manifester notre fraternité », continue-t-il. Avant lui, le maire de Paris, Bertrand Delanoë, est également venu apporter son soutien.
Certains veulent croire à l’action des gouvernements. « Les sanctions économiques sont la solution la moins pire », assure Ahmed, un militant. Samar, petite femme aux cheveux ébouriffés et membre de l’association Souria Houria (Syrie Liberté), qui a participé à l’organisation de la « vague blanche », lui fait écho en refusant d’armer les résistants. « C’est inutile, dangereux même. Notre peuple vit en harmonie depuis longtemps, la guerre n’a jamais engendré que la haine. C’est pourquoi nous sommes en blanc. »
Un point de vue que ne partage pas Canaan, un étudiant en architecture, arrivé en France il y a un an et demi. « Ce régime là ne va pas chuter grâce aux sanctions économiques. Seule une force militaire y parviendra, avec l’appui de la pression populaire et de l’Armée syrienne libre. » Tous s’accordent à dire que les manifestations comme celle-ci ne sont pas vaines. « On a peur que le monde s’habitue à ce qu’il y ait tous les jours des Syriens morts, continue ce grand échalas brun, engoncé dans une veste en cuir trop courte pour lui. Il faut donc manifester, continuer de réclamer la fin des assassinats. »
ATTIRER L’ATTENTION DES FRANÇAIS
Canaan harangue les manifestants en lançant des slogans anti-Assad. La foule reprend en cœur, bras levés, « La Syrie vivra, la Syrie vaincra ! », « Assad, t’es foutu, les Syriens sont dans la rue ! », ou encore « Bachar t’es con, nous ne sommes plus des moutons ! » Puis le calme se fait. Au cœur de l’esplanade, l’actrice Fadwa Suleiman, passionaria de la révolte, prend la parole. « Bachar Al-Assad, quoi que tu fasses pour nous diviser, nous tuer, nous mettre en morceaux, tu ne réussiras pas. La jeune femme aux cheveux ras marque une pause, essuie un sanglot. De Damas à Homs, le mouvement continuera. Rien ne pourra nous arrêter. »
Quelques applaudissements fusent, puis un homme lance à nouveau, le bras levé : « La Syrie vivra, la Syrie vaincra ! » L’esplanade du Trocadéro lui répond avant de se disperser. Les manifestants se prennent en photo. Au milieu de la foule, un très jeune enfant enveloppé dans le drapeau syrien fait le « V » de la victoire avec sa main droite, et brandit fièrement une autre bannière de la main gauche. Les photographes se délectent de ce symbole. L’objectif était d’attirer l’attention des Français sur le bain de sang syrien. Il a été atteint puisque caméras, micros et sympathisants se sont faits nombreux, en cette date symbolique du 66e anniversaire de l’indépendance syrienne.
Source: Le Monde