Syrie: à Homs, un jésuite partage la misère des assiégés
Published on Feb 4, 2014
Un vieux prêtre jésuite hollandais a choisi de rester avec les assiégés de la Vieille ville de Homs, au centre de la Syrie, où il ne reste que des miettes à manger et un espoir qui vacille. Durée:01:33
Dans le vieux Homs, un jésuite partage la misère des assiégés
Un vieux prêtre jésuite néerlandais a choisi de rester avec les assiégés de la vieille ville de Homs, sans rien à manger et avec un espoir qui vacille.
Le père Frans Van der Lugt a passé près de cinq décennies en Syrie, un pays qu’il aime profondément, au point de le considérer comme le sien, même s’il est né aux Pays-Bas. Bien que la situation soit terrible à Homs, où les habitants livrent un combat quotidien pour se procurer à manger et où la population chrétienne s’est réduite à quelques dizaines d’âmes, l’idée de quitter la ville ne lui a jamais traversé l’esprit.
« Je suis à la tête d’un monastère. Comment pourrais-je le quitter ? Puis-je abandonner derrière moi les chrétiens ? C’est tout à fait impossible », explique-t-il. « Le peuple syrien m’a tant donné, tant de gentillesse, tant d’inspiration, et tout ce que je possède. Maintenant qu’il souffre, je dois partager sa peine et ses difficultés », ajoute-t-il.
Le père Frans est arrivé en Syrie en 1966, après deux ans passés au Liban à apprendre l’arabe. À 75 ans, ses yeux sont vifs derrière ses lunettes quand il parle de son pays adoptif. Il décrit sobrement la souffrance des quelque 3 000 personnes soumises à un siège impitoyable et à des bombardements quotidiens. Les assiégés grappillent tout ce qu’ils trouvent pour se nourrir, mais la situation est désespérée.
« Nous avons très, très peu à manger. Les gens dans la rue ont le visage fatigué et jaune. Ils sont faibles, sans ressort. C’est la famine ici, mais les gens ont également soif d’une vie normale. L’être humain n’est pas seulement un estomac, il a aussi un cœur, et les gens ont besoin de voir leurs proches », dit-il.
Des humains avant tout
« Je suis le seul prêtre et le seul étranger à être resté. Je ne me sens toutefois pas comme un étranger, mais comme un Arabe parmi les Arabes », assure-t-il, un sourire aux lèvres. Il vit dans un monastère jésuite où une veuve lui fait la cuisine. Il fait ce qu’il peut pour les familles les plus pauvres du voisinage, qu’elles soient chrétiennes ou musulmanes. « Je ne vois pas les gens comme des chrétiens ou des musulmans. Je les vois d’abord et avant tout comme des êtres humains. »
Les délégations réunies dans les grands hôtels de Montreux ou de Genève « parlent de nous mais ne vivent pas avec nous. Elles devraient parler de ce que nous pensons et non pas de ce qui est bon pour elles », poursuit-il, en référence aux pourparlers de paix entre représentants du régime et de l’opposition qui se sont achevés sans résultat.
Mais aucune trace d’amertume n’est perceptible dans sa voix, et il insiste sur le fait que le régime comme l’opposition doivent trouver un moyen d’établir la confiance entre eux. « Si la confiance existe, alors les négociations peuvent être productives. Dans le cas contraire, cela ne marchera jamais, que les pourparlers se tiennent à Genève, Paris, Londres ou Honolulu. »