Trois questions à Farouk Mardam Bey, Président de l’Association “Souria Houria” (Syrie Liberté) à l’occasion du cinquième anniversaire de sa fondation
La Mémoire Créative – Entretien Exclusif.
Après 5 ans d’objectifs clairs et d’efforts denses et de relations étendues à tous les niveaux, quelle serait votre influence à l’échelle politique et publique en France?
Nous devons admettre que même si nos efforts ont connus quelques succès de point de vue médiatique, culturel et humain, et malgré l’étendue des relations que nous avons pu tisser, nous n’avons pas réalisé le but de toucher l’opinion publique, pour des raisons objectives que j’expliquerai par la suite. Peut-être nous avons réussi au niveau de 2 plans importants, au moment où la frustration et la rhétorique stérile ont proliféré:
1- La continuité que nous avons accompli en nous adhérant aux prémisses de la révolution, en organisant des activités variées et en suivant l’évolution et l’ouverture sur toutes les associations et les initiatives démocratiques et politiques, tout en étant indépendant financièrement de tout bord gouvernemental et non gouvernemental.
2- La crédibilité de notre association qui a été formée petit-à- petit dans la société civile et ses institutions, ainsi que dans les milieux culturels et journalistiques.
Comment expliquer le manque de solidarité populaire avec notre cause?
Nous supposons a priori que les Européens montrent spontanément une solidarité avec les causes justes du monde. Cette hypothèse est fausse, spécialement dans les circonstances actuelles à cause de L’hégémonie des préoccupations politiques et économiques locales sur tout le reste. Aujourd’hui plus que jamais, les Européens ne s’intéressent qu’à ce qui touche immédiatement leurs intérêts, positivement ou négativement. Et leur préoccupation sur ce qui se passe en Syrie se limite depuis deux ans, d’un côté sur la crise des réfugiés, et d’un autre côté sur le terrorisme de Daech et autres organisations, même s’il n’y a pas un rapport direct avec la situation en Syrie.
Au début de la révolution et dans le contexte du “Printemps Arabe”, l’opinion publique française compatissait avec le peuple Arabe, en particulier avec le peuple Syrien. Mais cette compassion a été réduite à cause des développements consécutifs de la situation en Libye, en Egypte et au Yemen.
L’émergence des organisations jihadistes après la militarisation de la révolution en Syrie a privé le pays de cette compassion humaine. En plus, quand les porte-paroles officiels de l’opposition ont montré une superficialité, une division et une dépendance, à l’exception de cas rares, il a été difficile au public de comprendre la réalité de la situation, et n’ont vu dans la révolution qu’un conflit entre les deux axes régionaux qui a engendré une guerre civile confessionnelle.
Depuis 5 ans, notre quotidien Syrien révèle plusieurs initiatives collectives et individuelles qui s’avèrent être plus proches de dispersion que de diversité et de compétence en l’absence d’une couverture globale. A votre avis, est-ce un point faible ou fort ?
Ces initiatives collectives et individuelles, avec leur vigueur et leurs compétences dans divers domaines, reflètent la réalité de l’opposition Syrienne nationale démocratique. Je veux dire par là, l’absence d’un acteur politique principal qui est capable de les unifier, ou de les aider à bien coordonner face au conflit avec le régime d’Assad, sur le terrain et dans les forums internationaux. Sans aucun doute, ces deux phénomènes, le vide politique et la rupture des communautés, sont les effets directs de la tyrannie qui sévit depuis plus de cinq décennies.